vendredi 29 février 2008

Une saga en Nouvelle France


J
'avais gardé, de ma première lecture des premiers tomes de la saga des Pionniers du Nouveau Monde, de Jean-François et Maryse Charles (éditions Glénat) un souvenir pas tout à fait impérissable.

A l'époque, je n'avais pas encore ce penchant fort pour le XVIIIe siècle, et ma connaissance sur l'histoire de la Nouvelle France se résumait à peu près à quelques souvenirs sur Montcalm et aux lectures des romans de Fenimore Cooper. Mieux que rien, direz-vous peut-être, mais pas grand-chose tout de même.

Et je me rappelle que je n'avais pas eu d'atomes crochus avec cette série de BD. J'étais pourtant encore très attaché au style de BD dit « franco-belge », même si ma découverte de La ballade de la mer salée d'Hugo Pratt et de Ranxerox de Tanino Liberatore m'avait ouvert les yeux sur d'autres horizons. Mais j'avais patiné en lisant les premiers albums :
- j'avais trouvé que le style de dessin à l'intérieur des livres était bien moins bon que les couvertures qui, elles, retenaient au contraire mon attention ;
- j'avais trouvé que trop de place était consacré aux textes de narration et pas assez aux images.

Peu séduit, j'avais donc tourné le dos à cette série.

Un commentaire à l'un de mes billets dans les salons de Monsieur de C. a réveillé ma curiosité. Il me fallait retourner vers cette série, la regarder avec de nouveaux yeux, maintenant que la passion dix-huitièmiste est bien ancrée en moi.
Malheureusement pour moi, la bibliothèque municipale ne disposait plus de cette saga, et j'hésitais à en acheter plusieurs albums d'un seul coup, au risque de regretter mon achat. La chance m'a souri dans le bac d'un bouquiniste itinérant, auquel j'ai pu acheter quatre des six premiers tomes (qui forment un cycle complet) pour quatre bouchées de pain.

Naviguant alors par la pensée vers la Nouvelle France, je me suis replongé dans cette série. Les années passées n'ont pas réussi à effacer toutes mes réticences, et mon ressenti a de nouveau été très partagé.
Je salue le travail de documentation qui donne beaucoup de corps à la série, le talent de Jean-François Charles comme illustrateur (on sent vite qu'il aime ces paysages du Canada), la vaste galerie de personnages savoureux, la place importante faite aux femmes dans le récit, l'utilisation des passions humaines, positives et négatives, comme moteur de la saga, et cette capacité à mêler les petites gens à la grande Histoire.
Pourtant, certains points continuent à me gêner aux entournures : le dessin et la mise en couleur médiocres du premier tome ; les visages parfois caricaturaux, surtout dans les premiers tomes, qui tranchent avec le caractère par ailleurs « réaliste » de la série ; les textes quelques fois trop envahissants, comme par souci d'en dire beaucoup tout en restant dans le format classique d'une BD de 48 pages.

Au final, ce cycle est une lecture plaisante dans l'ensemble, mais peut, par moments révéler des aspects pesants.
Les avis que j'ai recueillis auprès de lecteurs de la suite de la saga, et les critiques que j'en ai lues ici et là sur le net (dont celle-ci, fort détaillée) m'ont sérieusement refroidi. Je vais donc en rester à ce premier cycle, sans me perdre dans la suite.

Si j'avais un conseil à vous donner, ce serait d'emprunter la série à une de vos connaissances ou dans une bibliothèque, et de voir ensuite si vous voulez l'acquérir ou pas.


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Les amateurs du style de J.-F. Charles pourront trouver sur ce site-là par exemple, des fonds d'écran tirés de cette série.


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lundi 25 février 2008

Poète, obscène, vénitien


P
oète, Zorzi Baffo l'était, indubitablement.

Obscène aussi, tout aussi indublitablement.

Et vénitien, bien sûr.


Une édition chez Vertige Grafic nous avait présenté certains de ses sonnets érotiques servis par les aquarelles d'Hugo Pratt, l'art délicat de celui-ci permettant aux mots de celui-là de prendre quelque hauteur.

L'édition chez L'Archange Minotaure (Collection Le rose et le noir, 2008, ISBN-13 978-2354630126), au titre sans ambage, Poèmes luxurieux de la Venise du XVIIIe, met cette fois un pinceau féminin au service des vers de Zorzi Baffo. Le pinceau de Michèle Teysseyre, que j'avais découverte dans un ouvrage bien plus « sage », Saveurs et senteurs de la Sérénissime : 80 recettes vénitiennes (éditions Clairsud, 1999, ISBN 978-2951470606), dont il faudra que je vous dise quelques mots également.

En attendant que je vous parle des plaisirs de la table vénitienne, vous pouvez découvrir le contraste entre la délicatesse d'un pinceau sans pudibonderie et la crudité des mots sans retenue.

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dimanche 24 février 2008

Le dix-huitième englouti


M
es passions pour l'histoire maritime, pour le dix-huitième siècle et pour l'archéologie se rencontrent et se conjuguent lorsqu'il s'agit d'archéologie sous-marine sur un navire de cette époque-là.
J'avais déjà mentionné, sur ce sujet, l'ouvrage relatif au navire Griffin, de l'East India Company, la compagnie anglaise des Indes orientales.

Aujourd'hui, je change de média, passant du livre au DVD, avec le reportage Un corsaire sous la mer de Jérôme Julienne (production Gédéon Programmes / Arte France / CNRS ImagesMédia / Blueberry, 2002).
Le reportage est scénarisé comme une enquête policière. Le point de départ en est la découverte par deux pratiquants de chasse sous-marine, en baie de Saint-Malo, de canons gisant à faible profondeur. La prospection archéologique conduit à découvrir bien plus que des canons : un site de naufrage de grande surface, riche en éléments très divers. Mais les indices ne concordent pas les uns avec les autres, notamment en ce qui concerne la datation des objets remontés.

Alors, le rêve d'avoir découvert l'épave d'une frégate corsaire du XVIIIe siècle va-t-il s'envoler devant les résultats des analyses de datation ?

Ne comptez pas sur moi pour vous livrer les clés de l'énigme. Vous les découvrirez en regardant ce reportage, tout à fait didactique, et récompénsé par plusieurs prix. Bien sûr, le reportage suit un scénario, mais il n'en est pas artificiel pour autant. Je pense que c'est dû, notamment, aux personnalités très engageantes, sincères, des personnes qui interviennent. Mention spéciale à Michel L'Hour et Elisabeth Veyrat, du Département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines (DRASSM).

Et pour ceux qui ont des goûts éclectiques, comme moi, le DVD en question contient deux autres reportages très intéressants, l'un sur une jonque du XVe siècle en mer de Chine, et l'autre sur un grand navire de commerce étrusque au large de Giens en Méditerranée.

Trois voyages dans le temps, à savourer confortablement installé.


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Récompenses obtenues par le reportage :
- Meilleur film d'archéologie sous-marine, Cinarchea, Kiel - 2004
- Deuxième Prix, Trophée Mif Science, Festival de santé de Liège - 2004
- Grand Prix, KINEON, Bruxelles -2003
- Prix d'excellence, Festival du Film archéologique d'Amiens - 2003
- Grand Prix du festival du film archéologique d'Icronos, Bordeaux - 2002
- Prix Aventure scientifique, Festival du Scoop, Angers - 2002



Pour la petite histoire, j'ai fait la connaissance, voici quelques années, de Michel L'Hour, à l'occasion d'une animation associative sur l'archéologie sous les eaux en Aquitaine et en Pays Basque ; et, si je n'ai pas eu l'occasion de le rencontrer souvent par la suite, j'ai trouvé, tant en chair et en os que dans des reportages, il garde une simplicité dans son abord et dans sa façon d'être. Une qualité tout à fait appréciable.

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vendredi 22 février 2008

La France moderne vue par les cartes


P
uisse ce titre de billet ne pas vous amener à penser que je prends la cartomancie pour une m'amenant à comprendre la France des temps modernes. Les cartes dont il s'agit ne sont pas celle des tarots divinatoires, mais celles des géographes et historiens.

L'atlas de l'histoire de France XVIe-XIXe siècle, sous la direction de Jean Boutier (éditions Autrement, 2006, ISBN 978-2-7467-0787-X) court des frémissements de la Renaissance aux derniers sursauts de la Révolution de 1789. Même s'il aborde l'histoire par le biais du territoire, cet atlas est celui d'une géographie humaine et non physique, abordant des thèmes comme le monde paysan, les équipements culturels ou encore les places de négoce et de finance.
Chaque thématique est traitée sur deux pages en vis-à-vis, avec deux ou trois cartes, accompagnées chacune de son texte de commentaires.

Le complément idéal à des livres moins orientés vers l'image.

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jeudi 21 février 2008

Venise d'art


L
es initiatives visant à des approches transversales attirent ma curiosité. Porter un regard sur Venise par la rencontre de la peinture et de la musique était donc un façon de me titiller.

C'est ce qu'ont fait les gens de chez Opus 111, avec leur ouvrage livre + CD Venise, Musique et peinture du XIVe au XVIIIe siècle (1998). Format peu encombrant (un peu plus qu'un livre de poche), reproductions en quadrichromie de tableaux entiers et de détails, textes didactiques qui renvoient, chacun, vers des pièces du CD, cette double balade ne nécessite aucun entraînement préalable : chacun peut la faire à son rythme et selon son bon plaisir, sauter une étape, revenir en arrière.

Comme l'indique le titre, les artistes dix-huitièmistes sont bien présents : aux pinceaux, Guardi, Canaletto, Tiepolo, Carrera ou encore Piazetta, et aux portées musicales, l'incournable Vivaldi, ainsi que Benedetto Marcello, et Johann Adol Hasse que Venise a adopté en le faisant directeur musical de l'Ospedale degli Incurabili.

Une promenade ni élististe ni convenue, à la portée de tous.

Classique, trop classique ?

L'île au trésor de Robert Louis Stevenson est à la fois un excellent roman, devenu un « classique » de la littérature, et la matière première pour des adaptations pour le cinéma ou la bande dessinée.

David Chauvel et Fred Simon se sont à leur tour retroussé les manches pour s'attaquer à ce moment, et en donner leur interprétation en dessins et bulles. Mais la lecture de leur premier tome me laisse sur ma fin, car ils me donnent l'impression d'être trop prisonniers de l'oeuvre de départ, ne s'en éloignant ni dans le texte ni dans le graphisme. Leur Île est au trésor est plutôt une transposition en images, presque valeur ajoutée de leur part.

Je me suis senti bien loin des transports nés de la découverte de Long John Silver de Xavier Dorison & Mathieu Laffray, ou Le maître de Ballantrae d'Hippolyte.

L'île au trésor de Chauvel et Simon pourrait cependant être une bonne porte d'entrée pour un jeune lectorat que l'on conduirait ensuite vers le roman originel ou vers des adaptations plus audacieuses.

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lundi 18 février 2008

Venise en porcelaine

Reniflant, sur la toile, la piste d'antiquités et objets d'art vénitiens ou liés à Venise, je suis arrivé sur un site plutôt hétéroclite, à en juger par sa page de sommaire mais qui recèle quelques très belles pièces notamment dans la collection de porcelaines.

En particulier quelques représentations de personnages de la Commedia dell'arte


et deux personnages portant moretta, voile et voilette, sous de charmants petits tricornes.



Je regrette toutefois que certaines des photographies pâtissent de défaut de mise au point, ou d'arrière-plans qui enlèvent une partie du charme de ces pièces. Mais je ne vais pas trop me plaindre, étant déjà bien content que ces collectionneurs privés montrent de telles pièces.

Merci à eux pour leur partage.

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samedi 16 février 2008

Jouez sous le pavillon noir

Voici déjà quelques lunes que j'ai présenté, dans un billet, ce que sont les jeux de rôles. Mais les jeux de rôles ancrés dans le XVIIIe siècle sont rares, et j'avais mis en lumière l'un de ceux auxquels j'ai longtemps joué, Privateers & Gentlemen, qui a pour cadre l'âge d'or de la marine à voile, c'est-à-dire la fin du XVIIIe siècle et le début du XIXe.
Ce jeu est toutefois un vénérable ancêtre et, s'il était déjà peu pratiqué en France au moment où il a été publié, du fait de son thème assez spécifique, je doute que quiconque le pratique aujourd'hui dans notre beau pays.

Mon coup de lampe d'aujourd'hui porte sur un jeu bien plus actuel, Pavillon Noir, de Renaud Maroy, aux éditions Black Book. Ce jeu offre un univers qui se situe « à l'autre bout » du XVIIIe siècle par rapport à Privateers & Gentlemen, puisqu'il s'intéresse principalement à l'âge d'or de la piraterie européenne dans les Caraïbes et l'océan Indien, c'est-à-dire environ 1710-1730. Pavillon Noir permet de jouer dans d'autres périodes, comme celle des flibustiers (dont la « grande » période va, grossièrement, de 1640 à 1690). Mais le cœur du jeu est bien l'épopée des pirates, celle de ces écumeurs des mers, mus par des rêves de liberté et de fortune.
Certains ont marqué l'histoire de leur empreinte, comme Edward Teach dit « Barbe Noire », William Kidd et Bartholomew Roberts, et même quelques rares femmes comme Anne Bonny et Mary Reade. Pourtant, étoiles filantes sanglantes dans un ciel noir comme leur pavillon, elles n'ont eu que des « carrières » courtes et fulgurantes, un à trois ans en général.

Pavillon Noir propose de jouer des aventures de cet âge d'or de la piraterie, en incarnant l'un de ces révoltés-pillards. Présenté de telle manière, le jeu pourrait être considéré comme s'approchant de limites dont on peut se demander s'il est opportun de les tutoyer de l'esprit, même dans la cadre d'un jeu. Endosser le costume d'un grand criminel, voilà qui peut poser question. Cependant, il faut garder présent à l'esprit que, dans le cadre d'un tel jeu, l'idée est plutôt de se projeter dans une ambiance cinématographique, un grand spectacle, à la manière des films avec Errol Flynn et Basil Rathbone, ou ceux avec Johnny Depp et Orlando Bloom, selon les préférences ou les références générationnelles, ou des ambiances moins mouvementées mais tout aussi prenantes, comme celles des contrebandiers de Moonfleet.

Pour découvrir mon ressenti détaillé de ce jeu, écrit peu de temps après la sorti des premiers livres de la gamme, je me permets de vous renvoyer à la critique détaillée que j'en ai écrite dans le n°1 des Songes d'Obéron, le fanzine de la Cour d'Obéron. Vous trouverez également dans ce numéro une interview grand format que j'ai menée avec l'auteur du jeu, un des correcteurs et un des éditeurs.

Si je devais résumer mon avis d'aujourd'hui sur le jeu et sa gamme, je dirais qu'au-delà du succès éditorial qu'il représente dans un thème qui est une niche dans le monde du jeu de rôles (les grands succès du jeu de rôles s'inscrivent plutôt dans le courant médiéval-fantastique ou dans les aventures d'horreur des années 1920), Pavillon Noir offre aux maîtres de jeu une machinerie toujours fouillée, souvent complexe, et aux joueurs une grande richesse d'aventures.

Les informations données dans les divers livres de la gamme et le recours à des ouvrages d'histoire et de géographie permettent en effet à ceux qui préfèrent sortir des sentiers battus pirates-dans-les-Caraïbes d'explorer d'autres ambiances, de celle de la contrebande entre Bretagne et Cournouailles anglaise à celle de la poursuite des navires du Grand Moghol dans les eaux de l'océan Indien, en passant par les corsaires barbaresques en Méditerranée. Il est également possible de donner à des parties de Pavillon Noir une saveur de cape et d'épée façon Le Bossu de Féval ou Le chevalier d'Harmental de Dumas, C'est ainsi que j'ai publié dans le n°2 de la revue Black Box, éditée par Black Book, le scénario Quand tombent les masques qui a pour cadre Saint-Malo.


Le vent de l'aventure souffle à vos oreilles. Vous convaincra-t-il de vous embarquer ?


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Pour en savoir plus sur la gamme constituant ce jeu, reportez-vous à sa présentation sur le site du GROG, et au site de l'éditeur.

Ceux qui pratiquent déjà ce jeu peuvent échanger expériences et conseils sur le forum dédié à ce jeu par ses fans.



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Féerie d'Orient

-

Le nom de René Madec ne vous dit peut-être pas grand-chose, à moins que vous n'ayez commencé à entrevoir le destin extraordinaire de ce personnage au travers d'un billet que je lui ai consacré.
Le nom de Clément Marty ne vous peut-être pas plus, mais si je vous glisse à l'oreille qu'il a choisi « Bartabas » comme nom d'artiste, vous serez sûrement moins perdus.

Et quand Bartabas rencontre Madec et nous fait partager cette rencontre, cela donne Voyage aux Indes galantes, un féérique spectacle dépassant la seule prouesse équestre.


Du fort d'Aubervilliers où Bartabas s'était installé en 1989 et où, sous l'étendard de Zingaro, il a travaillé à la création de divers spectacles comme ses Cabarets équestres, Chimère, Eclipse, ou encore Loungta, aux Grandes écuries du château de Versailles où il a fondé, en 2003, son Académie du spectacle équestre, il y a à la fois changement de décor et continuité de l'amour du spectacle et des chevaux. Des spectacles à la force un peu brute, au sens premier du terme, nés du creuset d'Aubervilliers aux spectacles plus académiques nés du manège de Versailles, c'est la même envie de surprendre, la même envie de mêler le rêve et le beau, la complicité des hommes et des bêtes. Fusion de l'animalité et de la grâce qui sont, l'une et l'autre, tant dans les chevaux que dans leurs cavaliers.


Avec ce Voyage aux Indes galantes, Bartabas s'éloigne de son goût pour le dépouillement qui ressort de ses précédents spectacles et nous offre une féérie gorgée des fastes des Indes, où la magie de la pyrotechnie accompagne les chorégraphies équestres, où les chevaux marchent sur l'eau du bassin de Neptune. Le sang portugais des chevaux bat dans des cœurs orientaux, c'est Versailles à Madras et à Bhaktapur, au milieu des escrimeuses, des cerfs-volants, des éléphants.
Ce ne sont pas les vraies Indes, mais plutôt les Indes telles que les rêvaient les Français des Lumières. Ce n'est pas non plus l'adaptation de l'opéra des Indes galantes de Rameau, mais un clin d'œil de celle-ci à celle-là par le titre, par le caractère onirique des deux œuvres. Les musiques du spectacles, d'ailleurs, sont picorées ici et là, mélodies d'Orient, d'Occident, des Amériques aussi.

Le film essaie de restituer la profondeur du spectacle mais, par essence même, puisqu'il grave les images dans la matière, il perd ce sentiment d'éphémère qui fait que le spectacle vivant semble plus fort.Quand on le voit en direct, il me semble que l'on ressent les émotions plus puissamment, que l'on y porte plus d'attention, comme si, du fait de ce caractère éphémère, il fallait être plus gourmand de l'instant présent.

Mais ne boudons pas notre plaisir. A ceux qui n'ont pas eu la chance de voir ce spectacle en direct, le DVD offre la possibilité de s'en régaler tout de même. Il manquera les odeurs du manège, la rumeur des dix mille personnes du public, mais bien des émotions seront présentes néamoins.

A déguster sans modération.


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Les photos utilisées pour illustrer ce billet sont empruntées au site L'internaute à cette seule fin d'illustration et sans volonté de porter atteinte aux droits des propriétaires de ces images.

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jeudi 14 février 2008

Un maquignon devenu guide

Un maquignon connaît mille et une façons pour essayer de vous refiler une carne en la faisant passer pour un pur-sang anglais. Mais, au moins, il n’essaie pas de vous fourguer un baudet du Poitou en prétendant que c’est un cheval andalou.

J’en viens donc à me demander si c’est par roublardise ou par inculture (si j’étais méchant, je me laisserais aller à penser que c’est un peu des deux) que la personne qui a pondu les jaquettes de CD, sortis sous le label Chandos Chaconne, essaie de nous faire acheter de la musique du dix-septième siècle (celle de Biagio Marini, Dario Castello, Girolamo Frescobaldi et d'autres encore) en attirant notre regard avec du Pietro Longhi (Le charlatan ; regardez cela pour comparer) ou du Tiepolo (Le menuet, visible par exemple) ?



Fort heureusement, l’œil de Monsieur de C. ne se laisse pas prendre à de si viles manœuvres !




Fort heureusement aussi, d’autres illustrations de pochette, dans le catalogue de ce même label, correspondent mieux à la période du ou des compositeurs dont les oeuvres sont interprétées, comme pour Baldassare Galuppi.



Finalement, cette « supercherie » visuelle m’a permis de découvrir un catalogue fort riche en compositeurs dix-huitièmistes. Je donnerai donc une bastonnade moins virulente que je n’étais tenté de la donner.

mardi 12 février 2008

Goutte au nez et sourire aux lèvres

Alors que certains profitaient du temps ensoleillé de la fin de semaine qui vient de passer pour faire trempette à la mer, quelques individus se livraient à de curieux rites, à Montreuil-sur-Mer, dans le Pas-de-Calais, à peu près aussi loin de mes terres basques qu'il est possible de voyager en chaise de poste au sein de royaume de France.















Emperruqués, en chapeau ou en cheveux, vêtus de gros ou de velours, ils festoyaient, tant hommes que femmes, au cabaret de La goutte au nez.

Je ne doute pas qu'ils auraient accepté une compagnie tout aussi passionnée que la leur, pour partager bonne chère et bons conseils.



Mais j'incline à croire qu'il valait ne pas arriver sans s'annoncer, car le comité d'accueil, sur le chemin de ronde, ne maniait pas que la dive bouteille.




Je ne désespère pas de pouvoir chevaucher un jour jusqu'à eux. Mais je n'arriverai pas les fontes vides. Jambon de Bayonne et vin de Béarn, voilà des clefs qui doivent ouvrir les portes d'un tel cabaret.

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Retrouvez l'association Les menus plaisirs sur leur site et sur leur blog (et notamment leur billet sur cette activité à Montreuil), ainsi que dans mes billets (ici et ).
Les photographies sont reproduites ici avec l'aimable autorisation de cette association. Qu'elle en soit remerciée ici une fois encore.


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lundi 11 février 2008

Saint-George trop adulé ?

Alain Guédé, bien connu des lecteurs du Canard enchaîné, s'est pris de passion pour le chevalier de Saint-George, étonnante figure de ce siècle des Lumières que j'ai déjà évoquée dans un billet.

Il lui a consacré un livre, Monsieur de Saint-George, le nègre des Lumières (éditions Actes Sud, collection Babel, 2001, ISBN-13 : 978-2742734498). Cet ouvrage, à la croisée des chemins de la biographie et du roman d'aventures (il faut reconnaître que Saint-George, par sa vie hors du commun, se prête à cet exercice), tourne par moment au panégyrique, au risque d'en faire trop. La démonstration du caractère exceptionnel du personnage et de son oeuvre (surtout son oeuvre musicale) et de la nécessité d'une lutte contre l'intolérance en devient parfois pesante.

Mais Alain Guédé ne s'est pas arrêté là : il a également commis une oeuvre musicale en hommage à Saint-George. Je n'ai pas eu l'occasion de la voir, cependant les deux critiques que j'en ai lues, sur un même site mais sous deux plumes différentes (l'une par Sylvain Fort, l'autre par Maurice Salles), ne m'encouragent pas à faire beaucoup d'efforts pour voir par moi-même ce qu'il en est. Ou bien simplement par curiosité d'esprit, car l'intérêt du livret, sur des pièces de Saint-George, semble mineur, et même risible selon ces deux critiques.
Me laisserai-je aller à découvrir cette oeuvre pour me faire ma propre idée ?

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dimanche 10 février 2008

Des Indes au firmament

Benoît Le Borgne, devenu aux Indes orientales le maharadjah Benoît de Boigne, a été récemment invité dans les salons de Monsieur de C., pour y dire quelques mots de sa vie aventureuse.
D’autres Français ont également marqué l’histoire des Indes en ce dix-huitième siècle.

René Madec (1736-1784 ; voir sa biographie) est né et mort à Quimper. Mais, entre temps, sa vie trépidant l’aura amené en Inde. Là, ce fils de maître d’école, petit marin du commerce, va se tailler un royaume à coups d’épée, devenant ni plus ni moins qu’un des nababs de l’empire moghol !

Madec est arrivé sous mes yeux quand, au fond d’une caisse de livres entassés à la va-comme-j’te-pousse chez un bouquiniste, j’ai mis la main sur le livre d’Albert Le Bail, Le Nabab René Madec (éditions La découvrance, 2004, ISBN 2-84265-292-4 ; réédition du texte original de 1936).
J’essaierai de mettre la main également sur le livre de Jean Coué, René Madec, le Nabab du Grand Moghol (Liv’éditions, 1997, ISBN-13 : 978-2910781309), publié dans une gamme « pour la jeunesse ».

Bartabas, le centaure créateur de superbes spectacles équestres, s’est inspiré de René Madec pour créer son Voyage aux Indes galantes. Je ne manquerai pas de vous parler de ce spectacle, que je n’ai pas vu en direct, mais dont le DVD me fait de l’œil, sur mon étagère des choses à regarder « très bientôt ».


Aux éditions Les Indes savantes, le livre de Jean Deloche Jean-Baptiste Chevalier, Le dernier champion de la cause française en Inde (1729-1789) m’a fait découvrir un autre de ces Français que l’Inde a fait monter au palmarès des aventuriers de ce siècle.
Un homme d’une intrépidité et d’une audace étonnantes. Alors qu’il est employé de la Compagnie des Indes depuis 1752, il pénètre en Assam, royaume interdit aux Indiens eux-mêmes. Il revient à Dhaka où, avec quelques compagnons, il tient en échec pendant plusieurs mois l’armée d’un nabab local. Puis il part au Bhoutan, au Tibet.
En 1778, il est gouverneur de Chandernagor, lorsque les Anglais se saisissent de cet établissement. Chevalier fuit alors vers le sud, à travers des zones tribales. Capturé, il est ramené à Calcutta. Puis il fuit vers l’Europe. Fait naufrage en mer Rouge. Est harcelé par les Bédouins. Gagne Alexandrie par le Nil. Arrive en Italie, traverse les Alpes sur une luge et enfin, revient à Paris.
Bref, un personnage haut en couleurs, lui aussi.

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samedi 9 février 2008

Jours de mode

Vous appréciez les belles choses à l'ancienne, vous avez un peu de temps libre du 23 au 29 février prochain, et vous pouvez vous rendre à la capitale ?

Profitez-en pour aller flâner du côté de cette exposition-ci :




Pour plus de détails, consultez le journal de son organisateur.

Retenu dans mes terres lointaines par un rendez-vous musical (baroque et non dix-huitémiste), je ne pourrai m'y rendre moi-même. Mais j'essaierai d'en avoir des échos, à partager avec vous, aimables lectrices et chers lecteurs.

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vendredi 8 février 2008

Racontez-moi Venise

La Venise du Settecento m’avait assez peu intéressé, dans mes jeunes années. Probablement parce que mes yeux se portaient ailleurs, quand il s’agissait d’Italie : je regardais Florence et son Laurent le Magnifique, je regardais les condottieri, et je faisais semblant de tout comprendre à Machiavel.

C’est par la bande dessinée que j’ai attrapé le virus vénitien. Oh, pas dans le sens de « mal italien », comme on le disait au temps des guerres de François Ier, ou du « mal français » comme disaient les Italiens. Non, pas un de ces maux que l’on traitait par le mercure ou la lancette, mais un coup de foudre pour un lieu que je n’ai jamais visité jusqu’à aujourd’hui, et une époque que je ne connaîtrais jamais que par l’intermédiaire de témoignages.

Il a fallu que Giacomo C., la créature de Dufaux et Griffo, m’entraîne dans le lacis de canaux, calle et sottoporteghe, dans le tourbillon des velours et des masques, dans les parcs des villas de la Brenta et dans les squeri où naissent les gondoles, au bord des fosses communes et dans les ridotti où des fortunes se font et se défont.



Après Dufaux et Griffo et leur Giacomo C., ce sont deux Vénitiens qui, pourtant distants de deux siècles l’un de l’autre, me sont tombés dessus en même temps : Giacomo Casanova et Alvise Zorzi.


Casanova m’a tendu un piège avec ses Mémoires, dont j’avais trouvé une édition de poche, un peu tronquée, avant que de découvrir, bien plus tard, la très complète et très intéressante édition chez Robert Laffont.




Alvise Zorzi, lui, le descendant d’une des plus illustres familles de Venise, m’a pris dans ses filets avec plusieurs de ses ouvrages, dans lesquels il jette un regard à la fois aimant et sans concession sur sa ville et son histoire.

Comment résister à son superbe livre Venise. Une cité. Une république. Un empire. (édition de La Martinière, 2001, ISBN : 2-7324-2750-0 ; traduction française de l’édition mise à jour de Una città, una reppublica, un impero, Venezia, 697-1797, édition originale publiée en 1980) ? Il y a là presque tout pour comprendre Venise.

Deux autres livres de Zorzi m’ont aidé à voir derrière le voile : La république du Lion, histoire de Venise (Librairie Académique Perrin, 1988, ISBN-13 : 978-2262005061 ; traduction française d’un ouvrage italien de 1979) et Le Grand Canal (Librairie Académique Perrin, 1994, ISBN-13 : 978-2262009953 ; traduction française d’un ouvrage italien de 1991). Tout à fait passionnants, ils sont néanmoins organisés de manière moins "académique" que celui que j’ai cité en premier.



Pour qui chercherait une première approche à moindre budget, comment ne pas penser à ce livre de la toujours excellente collection Découvertes chez Gallimard : André Zysberg & René Burlet, Venise. La Sérénissime et la mer (Découvertes Gallimard Histoire, 2000, ISBN-13: 978-2070535194) ?



Pour aller un peu plus loin dans les questions historiques de la ville, quelques livres pas tout jeunes, mais facilement trouvables d'occasion :

- Philippe Braunstein & Robert Delort, Venise, portrait historique d’une cité (Editions du Seuil, collection Points Histoire, 1971, ISBN-13 : 978-2020006491) ;

- C. Diehl, La République de Venise (Flammarion, 1985, ISBN-13 : 978-2080811523) ;

- Frederic C. Lane, Venise. Une république maritime (Editions Flammarion, collection Champs, 1985, ISBN-13 : 978-2080811844 ; traduction française d’un ouvrage américain de 1973, Venice a Maritime Republic).














Enfin, une réédition récente d’une histoire de Venise très riche en détails, et présentée en coffret : Pierre Daru, Histoire de la République de Venise (éditions Robert Laffont, collection Bouquins, 2004, ISBN-13 : 978-2221913611).




Avec ces ouvrages-là, il y a de quoi s’imprégner de l’histoire de Venise, une étape qui me semble indispensable pour comprendre ce qu’est la Venise du Settecento, et dépasser le cliché de la ville du Carnaval permanent, de la superficialité et de la décadence.



Dans un prochain billet, je passerai en revue quelques livres plus directement consacré à la Venise du temps de Giacomo C., celle qui me fait vibrer.



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mardi 5 février 2008

Aurais-je oublié Venise ?

En revenant sur mes pas, dans ces colonnes, pour pointer des thématiques que je m’étais promis d’aborder et que j’ai laissées en déshérence pour l’instant, je me rend compte que si j’ai abordé Venise de manière indirecte, au travers de Canaletto qui l’a représentée, au travers de romans ou de bandes dessinées l’utilisant comme décor, au travers de ses masques ou de ses poètes, je ne lui ai pas offert une place de premier plan, une place bien à elle.



Or, s’il y a bien une ville dix-huitièmiste qui occupe mon esprit, c’est bien la Venise du Settecento, loin devant Paris, Londres ou Madrid. Bien évidemment, l’ayant découverte par la série de BD Giacomo C., notamment, j’ai d’abord été ébloui par ses charmes et, peut-être, son côté un peu superficiel.
Mais, partant des références bibliographiques données à la fin de l’un des tomes de cette série, j’ai commencé à explorer cette ville par les livres, récents et moins récents.

Je consacrerai donc, bientôt, des billets à Venise et à la Vénétie, avec des regards historiques, artistiques, architecturaux, gastronomiques.

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Illustration : Giacomo C. par Griffo, pour les éditions Glénat.

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Thalassa dix-huitièmiste


C
onti. Que voilà un grand nom du dix-huitième siècle.
Notamment porté par Louis François de Bourbon, prince de Conti. Après s’être distingué dans le services des armes, notamment pendant la guerre de Succession d’Autriche, il a été un fin diplomate, embarqué dans les manœuvres du Secret du Roi aux côté du comte de Broglie.
Nom porté aussi par plusieurs navires, dont au moins quatre vaisseaux de la deuxième Compagnie des Indes orientales.

L’Edition de Conti se place donc sous l’égide d’un grand nom. Et en ouvrant une collection dénommée Grande bibliothèque Thalassa, il était impossible qu’elle publiât des livres parmi lesquels je ne trouverais pas mon content.

A ce jour, j’ai acheté quatre livres de cette collection, tous de la plume de Julia Ferloni :
- Lapérouse : Voyage autour du monde
- De Lapérouse à Dumont d'Urville : Les explorateurs français du Pacifique
- Marchands d'esclaves : De la traite à l'abolition
- Bougainville, Cook, Lapérouse : Marins des lumières dans le Pacifique





Ces ouvrages, en grand format, démontrent pleinement la double casquette de Julia Ferloni, professeur d’histoire et diplômée de l’Ecole du Louvre, car ils offrent aussi un éclairage historique sur les différents thèmes traités qu’un choix très sûr de nombreuses et belles illustrations.

Ne vous éloignez pas, je dirai bientôt quelques mots de chacun de ces livres.

dimanche 3 février 2008

Introuvable référence ?


Sur un site consacré à Casanova et laissé en sommeil depuis longtemps, j'ai relevé la référence à un CD manifestement publié en Espagne, sous le label Deutsche Grammophon (DG002894456329), dans lequel Jaime Rosal a établi une compilation de musiques contemporaines de Casanova. Le titre de cette compilation est Giacomo Casanova y la musica de su tiempo (Giacomo Casanova et la musique de son temps).



Le contenu me paraît éclectique, et donc intéressant :
- allegro du Concerto pour flûte, cordes et basse continue No. 3 en do majeur (Frederick II, King of Prussia) ;
- aria "Con l'ali di costanza", tiré d'Ariodante (George Frederic Handel) ;
- symphonie en ré majeur Op. 3 No. 3 (Johann Adolf Hasse) ;
- alegro du Concerto en fa majeur, Op. 4 No. 12 (Pietro Antonio Locatelli) ;
- ouverture et marche de l'acte I des Fêtes de Paphos (Jean Joseph Cassanéa de Mondonville) ;
- Choeur "Dir Seele des Weltalls" de la cantate Dir Seele des Weltalls, K 429 (W.A. Mozart) ;
- Arias: "Madamina, il catalogo è questo" et "Ah pietà signori miei" de l'opéra Don Giovanni (W.A. Mozart) ;
- ouverture et aria "Parto, ma tu ben mio" de l'opéra La clemenza di Tito (W.A. Mozart) ;
- scène "Quelle plainte en ces lieux m'appelle" de l'opéra Hippolyte et Aricie (Jean-Philippe Rameau) ;
- fandango in ré mineur (Antonio Soler) ;
- concerto pour flûte et orchestre en fa majeur, Op. 10 No. 1 RV 433 "La Tempesta di mare" (Antonio Vivaldi).

Je n'ai pas trouvé ce CD sur le catalogue en ligne de Deutsche Grammophon. Quelque lecteur de ces colonnes-ci aurait-il connaissance du circuit dans lequel ce CD a été distribué ? Toute information concluante recevra mes chaleureux remerciements.

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vendredi 1 février 2008

Le maharadjah de Chambéry

Quand vous naissez fils de pelletier, en 1751, à Chambéry (dans cette Savoie qui appartient alors au roi de Sardaigne), qui pourrait penser que vous serez un jour un des grands hommes des Indes, riche à millions ? Pas grand monde, certainement. Il faut probablement un coup de pouce, un événement qui vous écarte de la voie qui semble toute tracée pour vous, celle de la reprise de la pelleterie paternelle.

Pour Benoît Leborgne, le coup de pouce, c'est la colère d'un mari trompé ! S'éloignant avec célérité et discrétion de Chambéry, le galant entame une carrière de soldat, qui va le mener en Flandre, à l'île Bourbon (notre actuelle île de la Réunion), en Turquie et en Russie. Il n'y a là rien d'infamant que de services d'autres couronnes que celle sous laquelle on est né, en ce siècle où le sentiment national n'existe pas vraiment.
Mais c'est en 1782 qu'il franchit un grand pas, en arrivant à Calcutta, sans un liard en poche, pour se mettre au service de l'East India Company, la Compagnie anglaise des indes orientales. En 1784, il passe à Madras au service d'un autre pouvoir, celui du maharadjah Mahadadji Râo Sindhia, un prince marathe qui poursuit le rêve hindou rêve de reprendre les Indes aux dominateurs moghols, souverains musulmans d’origine turco-mongole.

Benoît Le Borgne, qui a arrangé son nom en Benoît de Boigne, transforme l'armée de Mahadadji Râo en prenant exemple sur les armées européennes. Ses victoires, qui font de Mahadadji Râo le maître de l'Hindoustan, et l'amitié du prince lui valent d'amasser une grande fortune. Quand Mahadadji Râo décède en 1794, Benoît de Boigne - alors généralissime des armées du Grand Moghol, maharadjah, et souverain d'un royaume grand comme la France - ne cède pas à la tentation de prendre le pouvoir lui-même, et sert fidèlement le successeur légitime, Daulat Râo Sindhia.
Rentré en Europe en 1796, puis en Savoie en 1802, il obtient le titre de comte et consacre sa vie à des oeuvres de bienfaisance, jusqu'à sa mort en 1830, dans cette ville même où il était née. En son hommage, Chambéry fera dresser en 1838, par le sculpteur grenoblois Sappey, la surprenante « Fontaine aux éléphants ».


L'épopée flamboyante de Benoît de Boigne peut être découverte sous l'angle du roman, par exemple grâce à Benoît le Borgne, maharadjah, de Ghislaine Schoeller (éditions Robert Laffont, 1995, ISBN 2-226-07333-8), ou Le mercenaire du Gange, de Michel Larneuil (Albin Michel, 2000, ISBN : 9782226079732 ; LGF - Livre de Poche, 2002, ISBN-13 : 978-2253152439).

La fin de vie de Benoît de Boigne nous est connue notamment au travers des Mémoires de la comtesse de Boigne, Adèle d'Osmond, qu'il a épousée en 1798 (éditions Mercure de France, collection Le temps retrouvé, 1999, ISBN-13 : 978-2715221789).


Mettez vos pas de ceux de Benoît de Boigne, les Indes enivrantes vous attendent.

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