mercredi 30 mai 2007

Mines de plombs

Casanova a raconté son enfermement dans les prisons de Venise (les fameux « Plombs »), où l'avaient conduit les soupçons des Inquisiteurs. De cette partie de sa vie, il a souligné plusieurs aspects : l'arbitraire avec lequel la Sérénissime pouvait emprisonner un de ses sujets, le côté implacable d'une « justice » opaque que l'on pourrait qualifier de kafkaïenne - n'eût été le risque d'anachronisme -, son étrange relation avec son geôlier et, pour finir, son extraordinaire évasion par les toits.

Ce sont ces différents aspects que Patrick Mallet a mis en images et textes, avec Les plombs de Venise (éditions Milan, collection Treize Etrange). Ces BD m'ont séduit par leur format, leur graphisme et leur récit. Le fait que je sois mordu de Venise et de ce Vénitien y est probablement pour quelque chose.

Sachez que cette sympathique série (3 tomes) est disponible en coffret, avec un dépliant cartonné, façon petit paravent à poser sur le bureau.


La fiche de cette série sur le site de la Bédéthèque.

mardi 29 mai 2007

Fajardie morne plume

J'ai lu, à mon grand dépit, plusieurs romans "historiques" de Frédéric H. Fajardie, et je me suis retrouvé, chaque fois, enlisé dans des récits que j'ai trouvés franchement médiocres. N'allez pas me croire obnubilé par les Dumas, Zévaco et autres Féval ; des auteurs bien plus proches de nous arrivent à me ravir, avec des romans de cape et d'épée que ce soit dans le ton des continuateurs comme Monteilhet avec De plume et d'épée, des pastiches comme celui de Jean-Luc Déjean avec Le cousin de Porthos, ou des rénovateurs sombres comme Pérez Reverte avec son Capitan Alatriste.

Mais Fajardie, Fajardie... Morne plume...

J'avais déjà été échaudé, notamment, par Les foulards rouges. Mais, allez savoir pourquoi, je m'étais bêtement laissé convaincre par la lecture de la quatrième de couverture de La tour des demoiselles. Et voilà que je l'ai trouvé encore moins bon !
Là où j'espérais un roman un peu enlevé, je n'ai trouvé qu'une histoire cousue de (gros) fil blanc, confinant à la mièvrerie. Personnages si caricaturaux qu'ils en deviennent pathétiquement risibles, intrigues transparentes, ...
Sans compter que j'ai trouvé absolument irréaliste toute la partie "maritime" du roman. Bon, je vous le concède, c'est en grande partie dû au fait que j'ai un faible pour la marine à voile du XVIIIe siècle, et que les défauts grossiers de ce roman en la matière (par exemple une escadre comprenant uniquement trois vaisseaux de premier rang, lancée à la poursuite d'une frégate) me font le même effet que le sable dans un fricassée de chipirons (le nom local des calmars, en pays basque) : tout bonnement insupportable !


Ajoutons à cela que cet auteur est, à ce jour, la seule personne que je connaisse qui, sur son site personnel, ait à la fois une rubrique "biographie" et une rubrique "autobiographie" (vous voulez vérifier ?), et c'est l'étincelle qui met le feu à la soute aux poudres de la frégate rouge Terpsichore.


Si mon commentaire vous offusque, jetez-moi le gant et retrouvons-nous, avec ou sans témoins. Je vous attendrai dans le pré. ;-)

lundi 28 mai 2007

Cap sur les Indes

Voilà bien des années que l'expression « Compagnie des Indes » avait attiré mon attention, sans que je sache tout à fait ce qu'il y avait derrière ces mots. Peut-être des souvenirs de cours d'histoire, mêlant sans trop de précision des images de Dupleix, des princes indiens sur des éléphants, des soieries et des épices, et des noms chantants de comptoirs, Pondichéry, Chandernagor.
Imagerie d'Epinal, me direz-vous peut-être. Oui, certainement. Et c'est ce que j'ai voulu dépasser en me documentant.

J'ai fait mes premiers pas avec un volume de la collection « Que sais-je ? », celui de Michel Morineau, Les Grandes Compagnies des Indes Orientales (Presses Universitaires de France, Collection : Que sais-je ?, 1999, ISBN : 2130460763).

A la fois intéressant, dense et un peu aride, comme à peu près tout ce que j'ai lu dans cette collection, du fait du format de ces livres. Et une porte d'entrée vers d'autres lectures.


J'ai poursuivi pendant quelques temps, sans arriver à mettre la main dessus pour l'acheter, une édition de la thèse de Philippe Haudrère, La Compagnie française des Indes au XVIIIe siècle, 1719-1795, parue à la Librairie de l'Inde (1989, ISBN : 2905455039). J'en avais emprunté un exemplaire grâce à un prêt entre bibliothèques, et je m'étais retrouvé face à une mine d'or, à un décorticage complet de cette entreprise, ou plutôt de ces entreprises successives, de leur organisation humaine à leur économie, en passant par leurs navires.
Incapable d'en trouver un exemplaire chez des bouquinistes, je m'étais même rendu à Paris, directement à la Libraire de l'Inde, au début des années 2000, mais l'ouvrage était totalement épuisé y compris sur les rayons de l'éditeur, et il ne savait pas s'il en ferait une nouvelle édition. Je m'étais donc quasiment résolu à ne jamais avoir cet ouvrage dans ma bibliothèque personnelle, et recourir à des prêts inter-bibliothèques pour en disposer quelques semaines n'était pas d'une grande praticité.

Et voilà qu'en 2005, un autre éditeur publie une édition révisée et corrigée : La compagnie française des Indes au XVIIIe siècle, Philippe Haudrère (éditions Les Indes Savantes, collection Asie, ISBN : 2846540489). Plus de 1.000 pages en deux tomes, de quoi prendre le temps de voyager !

La même année, comble de bonheur, voilà qu'est publié le livre Les compagnies des Indes, de Philippe Haudrère et Gérard Le Bouëdec, avec la participation de Louis Mézin (Editions Ouest-France, collection Histoire, 2005, ISBN : 2737338697). Une plongée moins en profondeur, bien sûr, que la thèse d'Haudrère, mais un livre avec une vocation tout autre, puisque c'est un ouvrage destiné à un plus grand public, grâce, notamment, à une très riche iconographie et en particulier à celle prêtée par le Musée de la Compagnie des Indes de Lorient, dont Louis Mézin était le conservateur au moment de la parution du livre.
Le livre conduit le lecteur tout au long d'un voyage de Lorient aux Indes et retour, de la construction du navire jusqu'à la vente des cargaisons de soie ou de porcelaine. Il suffit de se laisser embarquer pour ce voyage.

Bien évidemment, ma découverte approfondie de ce sujet n'aurait pu se faire sans une visite au musée de la Compagnie des Indes à Lorient. Le genre d'endroit où une journée de visite ne me suffit pas. Et je compte bien y retourner, même si ce n'est pas la porte à côté.
Je me dois de signaler, également, le très intéressant Guide du visiteur (Société des amis du Musée de Lorient, 1993, 3ème édition, ISBN 2-9504920-02), qui intéressera même ceux qui n'auront pas eu la chance de visiter le musée.

Ceux qui apprécient des articles plus pointus trouveront leur bonheur dans les Cahiers de la Compagnie des Indes, publication à périodicité irrégulière (annuelle ou biennale) éditée depuis 1996 par le Musée de la Compagnie des Indes et la Société des amis du Musée.


Avec tout ceci, vous devriez être parés pour votre voyage avec la Compagnie française des Indes.

samedi 26 mai 2007

Osez le jeu de rôles

Certains rôlistes, c’est-à-dire des pratiquants de jeu de rôle (classiquement abrégé en « JDR »), ont la fâcheuse tendance à dire qu’il est particulièrement difficile de donner une définition claire et simple de ce genre de jeu. Je dis « fâcheuse » parce que cette tendance peut contribuer à refroidir les curieux des profanes ou, pire, à donner l’impression que les rôlistes sont, en quelque sorte, des initiés à quelque chose qui dépasse l’entendement des profanes.

Pour ma part, quand j’ai à expliquer quel genre de jeu est le JDR, je pars d’une comparaison simple : le jeu de rôle, c’est un peu ce que l’on fait entre enfants dans une cour d’école ou dans un jardin et que l’on joue aux gendarmes et aux voleurs, aux cowboys et aux indiens, à la princesse et au chevalier : il s’agit de se glisser mentalement dans la peau d’un personnage différent de soi et d’inventer avec ses camarades de jeu une histoire qui va évoluer selon les idées des uns et des autres.
Le jeu de rôle est un jeu de société, un proche cousin de cette pratique, mais avec des règles qui visent par exemple à éviter que certains joueurs ne monopolisent le jeu, ou à apporter une touche de hasard pour donner du suspense aux actions.
Le jeu de rôles sur table se différencie du jeu de rôle dit « grandeur nature » en ce sens que l’on joue assis autour d’une table et que l’on n’a pas besoin de réaliser, soi-même, les actions que l’on fait réaliser à son personnage et qu’on se contente de les décrire avec des mots.

Si vous souhaitez en savoir un peu plus, vous pouvez regarder du côté de cette page-ci ou de celle-là.

Mais vous pouvez aussi poser vos questions ici-même.

Pour ce qui est du JDR grandeur nature, comme je n’en suis pas pratiquant, je serais bien en peine d’être une source fiable de renseignement.


Il existe des centaines de JDR, qui différent par les univers dans lesquels ils invitent à jouer et par leurs systèmes de règles. Vous pouvez vous faire une idée de cette diversité en jetant un regard sur cette page-là.


Toutefois, dans l’ensemble, les principes sont toujours les mêmes : incarner un personnage, lui faire vivre des aventures partagées avec les personnages incarnés par d’autres joueurs.

Certains JDR ont pour cadre des univers inspirés d’œuvres de fiction littéraire (par exemple Le Seigneur des anneaux) ou cinématographique (par exemple La guerre des étoiles), ou des univers spécialement créés pour un jeu.
Cependant, le XVIIIe siècle a inspiré peu de JDR, en proportion de la galaxie de JDR de toutes sortes parus depuis plus de 20 ans. Je tâcherai de présenter ici ceux que je connais (et je n’ai pas la prétention de les connaître tous), à tout le moins pour éveiller votre curiosité. ;-)

Je me laisserai aller, également, à une présentation d'un JDR encore en gestation sous ma plume, ayant pour cadre la deuxième partie du XVIIIe siècle, en gros la période postérieure à la guerre de Succession d'Autriche à la veille de notre Révolution, et visant à faire vivre des aventures de styles variés. Mes inspirations pour l'écriture de ce jeu sont les BD comme la série Giacomo C., les films comme Barry Lyndon ou Ridicule, ou encore les livres comme Le secret du Roi.
Le titre de travail de ce jeu est Ombres & Lumières (O&L) : il s'agit en effet de proposer des cadres d'aventures au siècle des Lumières, tout en tirant parti des zones d'ombres (diplomatie secrète, espionnage, affaires criminelles, etc.).

Casanova gourmand

Il y a trois semaines, je consacrais un billet au livre Casanova - les menus plaisirs, et je promettais, dans les commentaires, de donner un coup de lampe sur un autre livre du même tonneau et toujours autour de ce cher Vénitien.

Je tiens parole aujourd’hui en attirant votre curiosité, et peut-être votre attention sur l’ouvrage de Jean-Bernard Naudin (photographies), Catherine Toesca (texte), Leda Vigliardi Paravia (auteur et réalisation des recettes) et Lydia Fasoli (stylisme), Casanova, un Vénitien gourmand (Editions du Chêne, 1998, ISBN 2-84277-083-8).

Les deux dernières phrases de l’avant-propos du livre posent très bien le décor : « [Casanova] eut, avec une imagination sans limite, la liberté et la folie de se consacrer à ses immenses appétits. Les plaisirs de la bouche et de la convivialité demeurent pour lui la première illustration de l’érotisme, de la réussite et du pouvoir. »

Le livre s’articule en quatre parties, quatre facettes du Vénitien : « Les racines du gourmand », « Les délices de l’amphytrion », « Les friandises du voyageur » et « les consolations du philosophe ». Le texte mêle des écrits d’aujourd’hui et des citations de l’Histoire de ma vie, tout comme les illustrations rassemble des photos d’aujourd’hui et des tableaux ou gravures d’époque. Le tout, subtilement arrangé, donne une impression de permanence et de contemporanéité à la fois.
Quant aux photos de mises en situation de recettes ou d’objets d’art de la table, elles constituent de délicates natures mortes pleines de vie, si je peux oser cet oxymore.

Quant aux recettes proposées, je regrette de ne pas être cuisinier pour les réaliser moi-même, mais, à les lire, j’ai l’impression qu’elles ne sont pas hors de portée de qui apprécie de se tenir aux fourneaux.

Vous laisserez-vous séduire, à votre tour ?

vendredi 25 mai 2007

Une cousette dix-huitièmiste

Après que j'avais publié un billet sur le film Barry Lyndon, j'avais reçu un commentaire de Lisa. Outre le fait qu'elle apprécie grandement ce film elle aussi, ce qui est un très bon point, Lisa manie aussi le ciseau, le fil et l'aiguille pour faire des costumes "historiques", un autre très bon point.

Je vous encourage donc à aller flâner du côté de son blog, pour y découvrir notamment ses créations XVIIIe siècle, dont vous aurez des aperçus à diverses phases, depuis leur conception en dessins jusqu'aux essayages du modèle terminé.

Et même si vous ne passez pas commande d'un costume, laissez-lui un petit message d'encouragement. :-)


[Merci à Lisa pour la fourniture de la photographie et l'autorisation de publication dans ce billet]

mercredi 23 mai 2007

Bougainville autour du monde... et chez vous

Dans un précédent billet, j'avais jeté un coup de lanterne sur une bande dessinée en deux tomes, Le passage de Vénus, de Dethorey et Autheman, qui conte une partie du voyage de Bougainville autour du monde. J'avais acheté ces BD en me souvenant du grand plaisir que j'avais pris à lire, voici vingt-cinq ans, le récit de voyage par Bougainville lui-même, dans la collection Folio de chez Gallimard.

Quelques années plus tard, j'avais découvert, grâce à une bibliothèque municipale, une édition bien plus belle, et que j'empruntais souvent en me disant : "un jour, je l'achèterai". Et voilà qu'il y a quelque temps, après avoir longtemps surveillé les bouquinistes et les sites internet de vente de livres d'occasion, j'ai enfin mis la main sur cette édition formidablement intéressante et tout aussi formidablement réalisée, illustrée, etc., mais totalement épuisée depuis plus de 20 ans :
Bougainville et ses compagnons autour du monde, 1777-1779, Imprimerie Nationale, 1977, Collection Voyage et Découverte.

Ces deux volumes (plus de 1.000 pages en tout), présentés en coffret, rassemblent non seulement le journal de Bougainville, mais également ceux d'Hervel, de Fesche, de Vivez, de Caro, de Nassau-Siegen, de Commerson, de Duclos Guyot et du chevalier Walsh.
Sans compter les commentaires ajoutés sur la préparation du voyage, les navires, les méthodes de navigation, la santé et l'alimentation, le bilan du voyage, etc.

J'ai été très content de mon achat (même s'il a fallu casser un peu la tirelire...).

Mais, pour ceux qui ne voudraient pas se mettre en quête de l'édition de 1977, il est plus facile de se tourner vers une récente réédition : Bougainville et ses compagnons autour du monde, chez Actes Sud (2006, 1120 pages, ISBN 978-2-7427-6271-2).

Je n'ai pas eu entre les mains cette réédition, et ne peut donc pas en dire grand chose. Mais si elle est d'une qualité comparable à l'édition de 1977 (et connaissant le sérieux des éditions Actes Sud, je ne peux imaginer qu'elle ne soit pas de grande qualité), alors je ne peux que conseiller cet achat, qui séduira les amateurs de voyages maritimes, les amateurs du temps des Lumières, et les amateurs de beaux livres.

lundi 21 mai 2007

L'arme du ridicule

Le film Ridicule de Patrice Leconte est une petite merveille.

J’apprécie ce genre d'aventure, où les bons mots et les faux pas peuvent vous valoir de passer du firmament aux abysses, où le "ridicule" peut faire plus de mal que toutes les épées.
Et, comme à l’escrime, pour échapper à ces coups de mots, certains choisissent de rompre le combat après le premier sang, en quittant la Cour, tandis que d’autres s’entêtent, qui à y perdre la tête.
Le jeune baron Grégoire Ponceludon de Malavoy, fraîchement débarqué de sa Dombes à la Cour pour y plaider la cause d’un assainissement des marais sources de fièvres putrides, va comprendre que droiture et vie courtisane sont antagonistes.

Si les rôles principaux et jeunes sont attachants (Charles Berling, Judith Godrèche), ma préférence va à aux acteurs et personnages plus mûrs, plus profonds (Jean Rochefort, Bernard Giraudeau et Fanny Ardant).

Les dialogues de Rémi Waterhouse sont de petits bijoux, tout en finesse et en acidité. Allez, pour la forme, un extrait :

(Devant chez M. de Blayac, qui vient de décéder, deux hommes sortent de la veillée mortuaire et croisent un "étranger" qui arrive pour se faire recevoir)
- Pardon, Messieurs. C'est la maison de monsieur de Blayac ?
- Oui. Vous êtes un de ses proches ?
- J'ai une lettre de recommandation pour M. de Blayac.
- Vous tombez bien, il reçoit en ce moment même. Vous le reconnaîtrez facilement à sa veuve. Adieu, Monsieur.

samedi 19 mai 2007

Des romans dans Venise au Settecento

Louis Armand, dans un commentaire sur un précédent billet, m’a demandé mes lumières sur "un "bon" roman, policier ou non, situé dans la Venise du XVIIIe".

Je n’en connais pas beaucoup. De ceux que j’ai lus, je ne pourrais citer (outre Le piège de Dante, d’Arnaud Delalande, dont j’ai dit quelque mal précédemment) que :

- La partita, d’Alberto Ongaro (existe en français aux Editions Messinger, 1987, et au Livre de poche). Une séductrice au cœur froid engage, avec le rejeton d’une famille vénitienne ruinée, une partie dont l’issue est bien incertaine et dont l’enjeu n’est autre qu’une vie. Il convient de noter que ce roman a fait l'objet d'une adaptation cinématographique : La partita, un film de Carlo Vanzina (1988), avec Matthew Modine et Faye Dunaway (plus de détails sur cette page-là). N'ayant pas vu le film, je ne saurais vous en dire plus.



- Vetro, d’Orazio Bagnasco (que j’ai indiqué dans un précédent billet, et dont je crois qu’il n’existe pas de traduction en français). Un roman très prenant, dans lequel Casanova est confronté aux menées secrètes de Don Juan, dans une intrigue qui tourne autour d’un chef-d’œuvre réalisé par les verriers de Murano (vetro, c’est le verre, en italien) ;


- Charles et Camille, de Frédéric Vitoux (Seuil Points Roman, 1998, ISBN 2020221772). Ce roman se déroule après la chute de la République de Venise, dans les années 1790.








Je n’ai pas lu Sérénissime Assassinat, de Gabrielle Wittkop (Seuil Points, ISBN 2.02.053057.0). Il m’a un peu tenté, mais j’en ai eu des échos pas très élogieux de ma libraire. Pour l’instant, j’ai donc évité.







Enfin, du fait qu’il ne cadre pas avec le Settecento, accordez-moi de ne pas porter pas dans cette liste le Remets ton slip, gondolier !, de San Antonio.

Nicolas Le Floch, tras los montes

J'ai consacré, il y a peu, un billet aux romans de Jean-François Parot mettant en scène son enquêteur Nicolas Le Floch.

Nos voisins d'outre-Pyrénées, de "tras los montes", peuvent désormais découvrir ces romans dans la langue de Francisco de Quevedo ou, pour prendre un auteur du XVIIIe siècle, de Nicolás Fernández de Moratín, grâce aux éditions Edhasa.

A ce jour, trois titres sont déjà parus :

Un goût de vase de la lagune

J’ai lu, voici quelque temps, Le piège de Dante, d’Arnaud Delalande (Grasset, 2006, ISBN 2-246-66041-6).

L’argumentaire de ce « roman policier historique » avait de quoi m’allécher. Pensez donc : une série de meurtres peu ordinaires en plein coeur de Venise au milieu du XVIIIe siècle. Je me suis donc précipité dessus, tel un papillon de nuit se jetant sur la flamme d’une lampe. Mais, si la façade de ce palazzo vénitien avait de quoi attirer mon oeil, sa visite m’a laissé un goût de vase.

Les plus :

Bien sûr, j’ai apprécié de me trouver plongé dans cette Venise du Settecento, brillant de mille feux et pourtant rongée de l’intérieur, étoile filante couverte des ors d’un passé glorieux et fonçant vers un funeste avenir.

J’ai également apprécié les coins de Venise et des îles de la lagune dans lesquels nous entraîne l’auteur, et dont il arrive à faire palper les couleurs, les sons, les senteurs.

Les moins :

Malheureusement, la rubrique « les moins » est bien plus fournie, à mes yeux, que la rubrique « les plus ». Voici les principaux points qui m’ont gêné dans ce roman :

- le personnage central du livre est une sorte de copie de Casanova. Le célébrissime Vénitien est d’ailleurs présent dans le roman, mais uniquement pour dire « le héros du roman est pareil à Casanova ». Et ça a fini par me lasser, parce qu’il y a trop de ressemblances tant avec des éléments des Mémoires de Casanova, qu’avec la série de BD Giacomo C (dont je ne cache pas que je suis grand fan et que je connais donc plutôt bien). Arnaud Delalande n’a, à mon goût, pas vraiment choisi son camp : il aurait fallu ou bien prendre un héros très différent de Casanova, ou bien prendre Casanova lui-même. Après tout, Dumas l’a bien fait avec son Artagnan. Faire de Casanova le héros d’un roman a été le choix, par exemple, d’Orazio Bagnasco, avec son roman Vetro (que j’ai lu dans une traduction en espagnol : La apuesta de Casanova, Editorial Plaza & Janes, 2000, ISBN 8401327954) ;

- ce même personnage principal est connu dans Venise comme « L’orchidée noire ». Sachez, d'abord, que La tulipe noire ne m’a pas vraiment passionné, ni en livre ou ni film. Mais, ici, cela donne un ton bouffon à un roman policier par ailleurs pas vraiment tourné vers l’humour façon justicier masqué. Sans compter que le côté « tout le monde connaît l’Orchidée noire mais personne ne le reconnaît dans la rue », voilà qui sent Zorro à plein nez, ce qui ne manque pas d'être en contraste avec le ton général du roman ;

- le ton du roman hésite entre le roman policier « réaliste » et le roman-feuilleton (avec ses personnages presque caricaturaux, ses intrigues cousues à gros fils, etc.). Et cette hésitation n’aboutit pas à une harmonie, mais à un patchwork qui me déroute ;

- si l’intrigue repose sur des éléments érudits (quoique, si vous avez bien lu le titre, vous avez tout de suite compris que les poèmes-intrigues sont tous tirés de La divine comédie de Dante), la conspiration qui sous-tend le roman frôle le ridicule, à force de vouloir jouer dans la cour des « grands méchants plus grands que nature ».

Au final :

Bref, trop de clichés dans ce roman pour en faire une lecture réellement plaisante pour moi. Et surtout, le regret que l’auteur n’ait pas voulu faire des choix clairs : le héros mauvaise copie de Casanova, le ton du roman qui ne se décide pas entre roman policier « dur » et roman feuilleton à la Feval.

J’attendais un solide polar vénitiano-casanovien, et j’ai trouvé un mauvais cocktail du Pacte des Loups et de la Tulipe Noire.

Donc, une note sévère (je dirais 2 sur 5), la sévérité comportant, je ne le nie pas, une part de subjectivité, due à mes espérances trahies.

vendredi 18 mai 2007

Association de malfaiteurs sympathiques

Comme d’habitude, il faudrait donner l’estrapade à celui qui a traduit le titre original (Plunkett and Macleane) en Guns 1748 pour le marché français.

Rien de vraiment transcendant, dans ce film, qui n’est pas, reconnaissons-le, un monument de cinéma. Mais c’est une petite histoire sympathique, sans autre prétention que celle d’offrir un bon moment de divertissement.


Un petit escroc et un gentleman désargenté associent leurs talents pour dépouiller les riches, dans l’Angleterre de 1748 (voilà qui vous explique la finesse du titre "français" !).

Un film de Jake Scott (le fils du réalisateur Ridley Scott), tourné en 1999, et dans lequel jouent notamment Robert Carlyle (vous l’avez sûrement vu dans Trainspotting ou Full Monty) et la toujours craquante Liv Tyler.

Difficile de rester tiède devant ce film. Je vous préviens, ça passe ou ça casse.

Pour moi, ça passe !

jeudi 17 mai 2007

François Boucher, dessinateur

François Boucher (Paris, 1703 ; Paris, 1770) est un des peintres phares du style dit "rococo", et plus largement un des artistes majeurs du XVIIIe siècle.
Membre de l'Académie royale de peinture et de sculpture, puis en grande faveur en France – où il jouit notamment de la faveur de Madame de Pompadour – et dans le reste de l’Europe, il finit par devenir premier peintre de Louis XV.
Ses tableaux peints vont des scènes champêtres aux représentations mythologiques, en passant par des portraits au pastel ou des scènes plus légères comme celle, très célèbre, représentant les charmes de Mademoiselle O’Murphy.

Mais, plus que pour ses tableaux, c’est pour ces dessins que j’apprécie Boucher. Je les ai découverts à l’occasion de la célébration du tricentenaire de sa naissance, qui a donné lieu, entre autres, à de deux expositions de dessins à Paris (Musée du Louvre et Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts) et une autre à New York (Frick Collection).
En 2003, je n’ai pas envisagé de me rendre à celle de New York, mais j’ai acheté le superbe ouvrage qui a servi de catalogue à cette exposition de la Frick Collection :
Les dessins de François Boucher. Exposition à la Frick Collection. Catalogue par Alastair Laing, avant-propos de Pierre Rosenberg. Editions Scala, 2003, ISBN : 2 86656 328 X


Voici une porte vers des sites de musées et galeries présentant des oeuvres de François Boucher.

mercredi 16 mai 2007

Un détective chez Sartine

Battant le fer tant qu’il est chaud, je vais consacrer ce billet, suite au précédent, aux romans policiers de Jean-François Parot mettant en scène son enquêteur Nicolas Le Floch. Je n’y procéderai pas au décorticage de chaque tome, mais vais plutôt brosser un avis général, dont j’assume par avance la totale subjectivité.


Le style. Une belle plume que celle de Parot. Le ton de son récit colle bien à l’époque, sans tomber dans la préciosité.

Le héros, Nicolas Le Floch. Son côté fils de gentilhomme de province monté à la capitale pour réussir est bien dans l’esprit de l’époque. Sa naissance et son caractère le mettent à mi-hauteur de l’échelle sociale, préoccupé du sort des gens de peu, et à la merci des désirs des puissants.

Les acolytes. Que serait un héros sans quelques savoureux personnages l’entourent ? Ici, vous trouverez M. de Noblecourt, qui est en quelque sorte le protecteur de Le Floch, et dont le grand âge n’a pas éteint l’esprit incisif aux accents voltairiens. Vous trouverez aussi Semacgus, qui a servi en tant que médecin sur les navires de la Royale, et qui conjugue ses talents de praticien et d’esprit avec Samson, le bourreau, ce duo formant, d’une certaine manière, l’équipe de "criminologie scientifique" sur laquelle s’appuie Nicolas Le Floch.

Le décor. Paris à la fin du règne de Louis XV. Forcément, je suis conquis. La ville prend des saveurs puissantes sous la plume de Parot. On y marche dans la fange ou sur le marbre, on y dîne d’huîtres ou d’une soupe claire, on y respire l’ambre ou la merde. Et Le Floch fouille dans les ombres.

Les détails. Si vous appréciez de vous laissez porter par un récit où l’on prend le temps de vous décrire les recettes de cuisine, vous y trouverez votre compte. Pour ma part, ce sont des choses que j’apprécie (cela me fait penser, par exemple, aux romans de Manuel Vazquez Montalban mettant en scène son détective gourmet Pepe Carvalho, ou à ces films avec Lino Ventura où il se passait toujours une scène devant les fourneaux).

Les intrigues. Les intrigues sont plutôt complexes, avec de nombreuses fausses pistes, et ça vous fera phosphorer les neurones. Un petit regret, toutefois : ces intrigues se cantonnent souvent à des affaires "privées", et je me plais à imaginer des intrigues qui iraient au-delà, vers des histoires d’espionnage (et l’époque ne manque pas de matière à cela)... Fort heureusement, le dernier titre en date (Le sang des farines) dépasse le cadre des affaires privées et apporte cette touche plus politique.

Globalement, j’aime donc beaucoup cette série. La chose que je regrette (et c’est le cas aussi, comme je l’ai écrit dans le précédent billet, pour la plupart des autres séries de "romans policiers historiques"), c’est qu’il n’y ait pas cette touche de cynisme que l’on trouve dans les polars "noirs" (à la Chandler ou Himes).


Sont parus à ce jour, par ordre chronologique, de 2000 à 2005 :
- L’énigme des Blancs-Manteaux
- L’homme au ventre de plomb
- Le fantôme de la rue Royale
- L’affaire Nicolas Le Floch
- Le crime de l’hôtel Saint-Florentin
- Le sang des farines
La série des romans de J.-F. Parot étant également publiée en poche, chez 10-18, vous n’avez aucune excuse financière pour vous passer de mettre le nez dans ces romans.


Vous pouvez découvrir une interview de l’auteur sur le site des éditions JC Lattès.

* * * * *

Polars parfum XVIIIe

En 2000, bien à l’abri du bug dont certains craignaient qu’il ne fît passer notre monde de la lumière à l’obscurité, je découvrais avec plaisir un roman policier dans la France de Louis XV : L’énigme des Blancs-Manteaux, de Jean-François Parot.

Si je suis grand consommateur de romans policiers et de romans historiques, je suis souvent sur la réserve au moment de plonger dans un roman policier historique.
Le polar historique présente, certes, l’avantage de pouvoir amener le lecteur à changer d’ambiance, tout en le laissant chausser ses souliers habituels. L’apprentissage de ce nouveau décor (vie quotidienne, mœurs, contexte politique, etc.) se fait généralement en douceur au fil du récit. Mais, pour avoir lu nombre de ces romans policiers historiques, j’en tire une sensation générale de plaisir tiède.
Certains d’entre eux, manifestement écrits par des auteurs qui sont d’abord des universitaires avant d’être des romanciers, sont un peu compassés, empesés. L’obligation de donner au lecteur les clés de compréhension de l’époque, du contexte politique, etc., pousse parfois les auteurs à faire donner ces informations par les personnages eux-mêmes, dans des monologues savants qui frisent le pompeux. La volonté de didactisme l’emporte alors sur la fluidité du récit.
En outre, beaucoup de ces romans sont dénués de cet humour cynique qui fait le charme de bien des romans noirs, comme si le poids de l’histoire écrasait à la fois l’auteur et le récit. Il y manque un brin d’ironie, ou de folie. La seule série de polars historiques dans laquelle j’ai trouvé ce piment est celle écrite par Lindsay Davis, et mettant en scène le "privé" Marcus Didius Falco, dans la Rome de Vespasien, Domitien et Titus.

Enfin, j’ai la faiblesse de trouver que nombre de ces intrigues manquent non seulement de "punch" mais aussi de suspense. Au manque de punch, vous pourrez toujours rétorquer que le style "vieilles Anglaises résolvant les énigmes autour d’une tasse de thé" a aussi son charme ; je vous concède le point, il s’agit là d’une simple question de goût. Mais il me semble que le manque de suspense est plus dérangeant quand on parle de romans policiers.

Fort heureusement, il y a, dans les romans policiers historiques ayant pour cadre le XVIIIe siècle, quelques bonnes surprises, dont les romans de Jean-François Parot ou de Bruce Alexander. J’en ferai état plus en détail dans de prochains billets.


Note : la majeure partie de ce billet d’humeur est directement inspirée d’un article que j’avais écrit, dans le n°2 du fanzine Utopies, à propos des romans policiers ancrés dans le Moyen Age, sous le titre Fin limiers médiévaux. Les considérations générales que j’y expose s’appliquent tout aussi bien aux romans policiers ayant pour cadre d’autres époques historiques, et je me suis donc permis de les reprendre ici.

mardi 15 mai 2007

Mémoires... Mémoire...

Je trouve les mémoires de grands et petits personnages intéressants par leurs témoignages de première main, par leur vue (préjugés compris) sur leur temps, par leur façon de raconter (d’enjoliver, parfois) leur propre existence.

Les Editions Mercure de France publient, dans la collection "Le temps retrouvé / Poche" une série de de ces mémoires. Plusieurs de ces ouvrages s’inscrivent dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle, et j’en ai acheté plus d’un. Avec des prix dans la dizaine d’euros, ce sont là des achats tout à fait recommandables. Pour l’instant, et sauf oubli de ma part, j’ai acheté, chez cet éditeur, les ouvrages suivants :

- Cardinal de Bernis, Mémoires

- Duc de Choiseul, Mémoires

- Président de Brosses, Lettres d’Italie (2 tomes)

- Scipion de Castries, Souvenirs maritimes

- Lorenzo Da Ponte, Mémoires (1749-1838) [le librettiste de Mozart]

- Madame Du Deffand, Lettres

- Madame Du Hausset, Mémoires sur Louis XV et Madame de Pompadour

- Carlo Goldoni, Mémoires de M. Goldoni, pour servir à l’histoire de sa vie et celle de son théâtre [indispensable sur Venise]

- Prince de Ligne, Mémoires

A ceci s’ajoutent les Mémoires du Marquis de Valfond, et les Mémoires du Comte de Saint-Priest, toujours chez Mercure de France et dans la collection Le temps retrouvé, mais pas en poche.


Chez un bouquiniste, j’ai mis la main sur un livre rassemblant des extraits du Journal anecdotique d’un parisien sous Louis XV, 1727 à 1751, d'Edmond-Jean-François Barbier, textes choisis et présentés par Hubert Juin (aux éditions Le livre club du libraire, sans date).


Comme je l’ai signalé dans un autre billet, je ne pouvais, bien entendu, pas passer à côté des mémoires d’un de ceux qui m’ont ouvert les portes du Settecento : Casanova.
J’ai acheté son Histoire de ma vie, aux éditions Robert Laffont, collection Bouquins (3 volumes).
J’ai également acheté, dans une édition de format réduit qui avait attiré mon œil, son récit Ma fuite des prisons de Venise qu’on appelle les Plombs. Plusieurs éditions existent, sous des titres variables (par exemple Histoire de ma fuite des prisons de Venise).


Enfin, deux autres livres (chez Robert Laffont, collection Bouquins) complètent ma collection – toujours en cours d’évolution – de mémoires dix-huitièmistes :

- Paris le jour, Paris la nuit, construit à partir d’écrits de Louis Sébastien Mercier (Tableau de Paris, Le nouveau Paris) et de Nicolas Edme Restif de la Bretonne (Les nuits de Paris) ;

- Les Français vus par eux mêmes, Le XVIIIe siècle, Anthologie des mémorialistes du XVIIIe siècle, une sélection de textes par Arnaud de Maurepas (un nom illustre, n’est-il pas ?) et Florent Brayard, une approche thématique (« Le pays », « Les gens ») accompagnée de notices biographiques.



De quoi offrir de belles soirées de lecture en bonne compagnie.

dimanche 13 mai 2007

La route des Indes, au fond de l'eau

Je suis passionné du XVIIIe siècle, vous le savez, et de tout ce qui touche à la mer au sens large (histoire, sciences, ethnologie, etc.). Et, au milieu de tout ça, j'ai un faible pour les navires de l'âge d'or de la marine à voile, pour l'archéologie sous-marine et pour les histoires de compagnies des Indes.
Et voilà qu'au cours d'un séjour parisien, au début du mois de juin 2006, à Paris, j'ai eu l'occasion de faire une très bonne acquisition, dans une boutique de livres d'occasion particulièrement sympathique, la Galerie de la Sorbonne, rue des Ecoles : le livre Griffin, une rencontre avec l'histoire, de Franck Goddio et Evelyne Jay Guyot de Saint Michel (Periplus Publishing, London, 1999, ISBN 1 902699 01 78 ).

Le Griffin était un navire de l'Honorable East India Company (la Compagnie anglaise des Indes orientales), qui a coulé en 1761 avec une cargaison de soieries, de porcelaines et de thé dans la mer de Soulu, alors qu'il rentrait de Chine. Le navire a été retrouvé et a fait l'objet de fouilles archéologiques, puis d'interprétations de sa cargaison, etc.
Le livre fait état non seulement de ces fouilles et de la cargaison, mais également du contexte : le commerce international au milieu du XVIIIe siècle, les relations politiques et commerciales dans cete partie du monde, le souhait de l'Angleterre d'implanter une base aux Philippines, etc.

Ajoutons à cela que le livre est magnifique (grand format, présentation en coffret bleu foncé à moirures).

Et, comble de bonheur, je l'ai acheté d'occasion, dans un état "comme neuf", pour un prix exceptionnel (35 Euros, ne le cachons pas).

Il y a des jours, comme ça, où la chance sourit.

samedi 12 mai 2007

Les soieries s'exposent

Envie d’une visite au musée ? Envie de soieries ?

Le Philadelphia Museum of Art (musée d’art de Philadelphie, Etats-Unis) vous tend les bras, avec son exposition The Bizarre and the Beautiful: Silks of the Eighteenth Century (L’étrange et le superbe : soies du dix-huitième siècle), jusqu’au 30 septembre 2007.

Evidemment, Philadelphie est probablement un peu loin de chez vous pour que vous soyez tenté de faire un saut voir cette exposition qui ne compte, en fait, que 13 objets des collections du musée. En tout cas, c’est un peu loin pour moi.

Je vais me mettre en quête de quelque chose de plus proche. Exposition ou beau livre, je finirai bien par trouver.

Si vous avez des pistes à indiquer, n’hésitez pas à laisser un commentaire.

vendredi 11 mai 2007

Vivre l'Histoire

A l’occasion d’un furetage dans le forum Passion Histoire, je suis tombé sur une discussion sur les questions d’étiquette au temps des Lumières, de noblesse et de relations maîtres-domestiques. Une discussion très concrètement mise à profit par un groupe québécois, la Société d’histoire In Memoriam (SHIM), qui a choisi de faire découvrir et vivre l’histoire par le biais de reconstitution de diverses époques.

L’un des groupes de la SHIM, Soldats du Roy et Habitants en Canada, s’intéresse donc plus particulièrement au milieu du XVIIIe siècle en Nouvelle France.

Au travers de leur site et de l’album photos, vous pourrez découvrir leurs créations de vos propres yeux. Pour ma part, je salue non seulement tout ce que je vois, mais aussi tout le travail invisible qui a conduit à ces résultats visibles, qui donne l’impression d’un reportage ethnographique et pas d’une reconstitution empesée.


A défaut de pouvoir partager l’un de leurs repas que j’imagine fort sympathique, je lève mon verre à cette Société !

jeudi 10 mai 2007

Chevalier des Indes

Aux éditions Les Indes savantes, le livre de Jean Deloche, Jean-Baptiste Chevalier, Le dernier champion de la cause française en Inde (1729-1789), m'a fait découvrir un de ces Français que l'Inde a fait monter au palmarès des aventuriers de ce siècle.

Un homme d'une intrépidité et d'une audace étonnantes. Alors qu'il est employé de la Compagnie des Indes depuis 1752, il pénètre en Assam, royaume interdit aux Indiens eux-mêmes. Il revient à Dhaka où, avec quelques compagnons, il tient en échec pendant plusieurs mois l'armée d'un nabab local. Puis il part au Bhoutan, au Tibet.
En 1778, il est gouverneur de Chandernagor, lorsque les Anglais se saisissent de cet établissement. Chevalier fuit alors vers le sud, à travers des zones tribales. Fait prisonnier, il est ramené à Calcutta. Puis il fuit vers l'Europe. Fait naufrage en mer Rouge. Est harcelé par les Bédouins. Gagne Alexandrie par le Nil. Arrive en Italie, traverse les Alpes sur une luge et enfin, revient à Paris.

Bref, un personnage haut en couleurs, et pourtant peu connu.


Découvrez ce livre sur le site de son éditeur.

mercredi 9 mai 2007

Quand l’Histoire se lit comme un roman


Le Secret du Roi, de Gilles Perrault, fait partie de ces livres que j’ai dévorés.
Est-ce un livre d’histoire qui se lit comme un roman, un roman qui fait vivre l’histoire ? Qu’importe de le savoir, tant j’ai apprécié cette oeuvre.

Il s’agit, en fait d’une trilogie : Le secret du roi, L’ombre de la Bastille et La revanche américaine.

Le secret du roi et L’ombre de la Bastille s’intéressent très directement à l’histoire du "Secret du roi", qui était, en quelque sorte, le service secret diplomatique de Louis XV. Ce service travaillait sans que la diplomatie officielle en soit informée, ce qui n’allait pas sans poser de problème, puisque diplomatie officielle et diplomatie secrète n’allaient pas dans le même sens.

La fonction première du Secret du Roi était d’essayer d’asseoir un prince français sur le trône de Pologne (l’accession au trône de Pologne se faisait alors par un système d’élection). Mais il a aussi servi à jouer contre l’Angleterre, notamment après après la guerre de Sept Ans dont l’issue avait été très défavorable à la France (notamment parce que la France n’avait pas idée du poids économique de ses territoires coloniaux en Amérique et dans les Indes). Parmi les agents du secret, il y a eu des personnages peu connus du grand public (comme Charles de Broglie, ou Tercier), mais aussi des figures extravagantes comme le chevalier d’Eon.


La revanche américaine se déroule plutôt sous Louis XVI. On y retrouve les agissements secrets des Français pour nuire à l’Angleterre, et plus particulièrement dans le soutien apporté aux insurgés des "colonies" américaines. Parmi ces agents français, personne de moins de Beaumarchais, sous son pseudonyme de Roderigue Hortalez, grenouillant à Londres et dans les ports français pour livrer des armes aux rebelles américains.

Avec cette trilogie du Secret du Roi, il y a de la matière à de très prenantes aventures, des ambiances variées d’espionnage, avec des agents doubles ou triples, des codes secrets, des retournements, des opérations de désinformation, des empoisonnements, de Londres à Saint-Pétersbourg, de Vienne à Paris, de Varsovie à Boston. Un délicieux cocktail jouant sur des ingrédients que ne dédaigneraient pas John Le Carré, Eric Ambler ou Ian Fleming.

Des aventures où les agents secrets portent des gilets de soie, des cols en dentelle, et des épées à poignée tissée de fils d’argent.

Courez acheter ces trois livres. Ils sont disponibles au Livre de poche, vous ne vous ruinerez pas.

mardi 8 mai 2007

Sur les traces de Casanova

Casanova a parcouru l’Europe, passant de ville en ville parfois de gré, parfois de force.
Hartmut Pablo Günther a relevé un extraordinaire défi : suivre les pas du Vénitien tout au long de ses voyages, de ses errances et en tirer un livre électronique, le Casanova tour, ni plus ni moins qu’un guide de voyage en attelage privé dans l’Europe et l’Amérique du dix-huitième siècle.
Un travail de passionné, entrant dans une extraordinaire richesse de détails : recensement des voyages, comparaison des particularités des relais de poste selon les pays, durée et prix des trajets, typologie des attelages et des carrosses, et bien d’autres encore, comme les budgets personnels de Casanova. Le tout agrémenté d’illustrations d’époque et d’aujourd’hui.

Si je peux exprimer un petit regret, c’est celui de ne pas pouvoir disposer de ce "livre électronique" sous forme d'un fichier PDF, pour le lire plus facilement qu’en faisant défiler les écrans.


Un tour d’Europe.

Un tour de force.

Un coup de chapeau.

lundi 7 mai 2007

Ce très cher Voltaire

Les manuscrits autographes ont la cote auprès des passionnés, des collectionneurs.
Et Voltaire peut se targuer d'avoir fait monter les enchères très haut : le 30 mai 2006, à la galerie Charpentier de Sothesby's à Paris, vingt-six de ses lettres à l’impératrice Catherine II de Russie ont été achetée pour 583.200 €, établissant par là-même le record mondial pour une correspondance autographe du XVIIIe siècle.

Mais c'est le genre de passion qui me passe un peu par-dessus la tête. J'y vois soit de l'idolâtrie, soit de la spéculation, deux penchants qui me sont plutôt étrangers.

Et vous, iriez-vous enchérir ?

dimanche 6 mai 2007

Casanova, les plaisirs de la chère

Je ne suis pas angélique au point de penser que la vie quotidienne au dix-huitième siècle était faite de douceur et de luxe pour tout le monde. Cependant, sans ignorer la vie dure, voire misérable, d’une grande partie de la population, je reconnais que je me laisse porter vers les représentations d’un certain art de vivre, et notamment celui de la table.


Comment, dans ce cas, ne pas me laisser convaincre par le livre Casanova, les Menus Plaisirs ? Les textes et les dessins d’Hippolyte Romain, les photographies de Daniel Nève et le stylisme de Françoise Florès nous ouvrent les portes du monde casanovien des plaisirs de la chère. A Venise comme à Paris, Giacomo Casanova se régale et régale ses amis, ses maîtresses.

Le livre nous convie à ce voyage sensuel, en compagnie de Casanova, bien sûr, mais aussi d’artistes de son époque, peintres de sa Venise natale comme Guardi ou Canaletto, peintres français comme Jean-François de Troy ou François Boucher, et des photographies de velours et de dentelle, de natures mortes et de palazzi.

Pour s’achever sur des recettes et menus délicats et voluptueux, comme ce Souper des demoiselles de l’Opéra, avec sa salade façon marquise, ses cailles en petite vertu, son jeu de parmesan et sa compote de pommes à la cannelle.



Un ouvrage à déguster.


Casanova, les Menus Plaisirs, Hippolyte Romain et Daniel de Nève, Editions Plume, 1998 (ISBN : 2-84110-070-7)

samedi 5 mai 2007

La petite guerre en dentelles


J
’ai découvert le jeu de guerre (ou wargame) il y a une trentaine d’années, grâce à la revue Jeux & Stratégie. Et, à défaut d’en être un pratiquant très assidu, je me tiens au courant de son actualité au travers de la revue Vae Victis, une référence en la matière au niveau national et international.

Le jeu de guerre est un jeu de société dont le but est de simuler les affrontements entre deux camps. Une sorte de descendant du jeu d’échecs, mais sur un espace de jeu plus grand et plus diversifié, et avec des pièces plus diverses elles aussi.

Les camps qui s’affrontent peuvent représenter des effectifs d’échelles très différentes selon les jeux : dans certains cas, le jeu simule le combat de quelques hommes dans un camp et dans l’autre (on parle alors de jeu d’escarmouche), et dans d’autres cas, chaque camp comporte une armée entière, voire plusieurs armées (le jeu est alors dit stratégique), et l’on trouve aussi des échelles intermédiaires.


Les camps sont représentés par des pions ou des figurines, que l’on déplace sur une carte marquée de cases (souvent des hexagones) ou sur un terrain non marqué. Selon l’échelle du jeu, un pion ou une figurine représente un seul homme ou un groupe d’homme d’effectif plus ou moins grand.
Des jeux de guerre existent aussi en version informatique.


De nombreuses périodes historiques ont inspiré les créateurs de jeux de guerre, avec des succès notables pour les jeux ancrés dans l’ère napoléonienne et deux de la deuxième guerre mondiale.


Le siècle des Lumières n’a pas été avare en guerres, et il a donc inspiré des jeux de guerre, lui aussi. Notamment pour simuler les affrontements terrestres de la « guerre en dentelles », mais aussi pour simuler les combats sur mer.


Je consacrerai des billets à certains de ces jeux.

Les Lumières, oui mais...


Une autre personnage tout à fait exceptionnel (dans une période qui n'en manque
pourtant pas) et que j'avais découvert grâce à une émission de France Musique voici
quelques mois : le chevalier de Saint-George.
Cette émission m'avait donné d'en savoir plus sur lui, et j'ai acheté et dévoré le livre que
Claude Ribbe lui a consacré : Le chevalier de Saint-George (Editions Perrin, 2004,
ISBN 2-262-02002-7).

Joseph de Bologne de Saint-George est le fils d'un ancien mousquetaire et d'une esclave antillaise. Au cours de sa vie qui vaut mille romans, il sera un compositeur de grand talent (on dit qu'il influença Mozart), un escrimeur réputé invicible, un agent secret. Il côtoiera le chevalier d'Eon, Mirabeau, Haydn, Henry Angelo (le maître d'armes, fils de Domenico qui a écrit un célébrissime traité d'escrime), Marie-Antoinette, et tant d'autres.

Il sera confronté à des réactions dues à la fois à sa peau de couleur et à son ascendance servile. Le livre de Claude Ribbe, en cela, apporte des éléments qui ne sont pas à verser au crédit d'un siècle qui se voulait celui des Lumières...

Histoire d'une vie... et quelle vie !


"Histoire de ma vie"...
Quoi de plus simple et de plus ambitieux à la fois, pour donner un titre à des mémoires ? C’est le choix que fait Jacques Casanova de Seingalt, lorsqu’au crépuscule de sa vie, il couche sur le papier ce récit de ses années d’homme-kaléidoscope : aventurier, séducteur, polémiste, kabbaliste, ou encore organisateur de loterie.

Réduire Casanova à l’image réductrice d’homme à femmes qui colle à son habit, c’est oublier, voire dénigrer, toutes les autres facettes de ce personnage si représentatif d’une partie de son siècle.

S’embarquer dans la lecture de ses Mémoires, c’est le suivre dans ses aventures, ses voyages, ses rencontres. Joueur, soldat, violoniste de théâtre, auteur dramatique, secrétaire d’ambassade, voilà bien des visages, souvent méconnus, de Casanova.

Pour le découvrir en détail, sous sa propre plume, tout en profitant du regard critique de spécialistes du personnage et de son temps, une seule édition est à retenir : celle, basée sur le manuscrit original intégral et complétée de textes inédits, parue aux éditions Robert Laffont, collection Bouquins, en coffret de 3 tomes.

"Pour les mortels, la vie est un combat, pour les poètes, un voyage ; pour le Vénitien Giacomo Casanova – autoproclamé chevalier de Seingalt – elle est encore un festin où il trouve toujours sa place, un jeu ininterrompu, prétexte à un éternel défi."
Francis Lacassin, préface d’Histoire de ma vie, éditions Robert Laffont.

vendredi 4 mai 2007

Madrid en musique

Héritière, en quelque sorte, des chansons des jácaras du Siècle d’or espagnol, la tonadilla est une chanson populaire qui servait, à l’origine, d’entracte dans les représentations de théâtre, en alternance avec des numéros de danse.
Au dix-huitième siècle, elle prend une forme plus évoluée, pour devenir la tonadilla scénique, pièce à part entière de théâtre chanté, d’ambiance comique et de courte durée. La période 1750-1790, et surtout le règne de Carlos III (1759-1789), en marque l’apogée, quand la tonadilla scénique fait fureur dans les théâtres madrilènes.
Pour la découvrir avec vos oreilles, écoutez donc le disque El maestro de baile y otras tonadillas (publié en 2003 par le label K617, ASIN B0000AH3DR), regroupant des œuvres de Luis Mison, Pablo Esteve, Blas de Laserna, Antonio Rosales et Pablo de Moral, interprétées par l’ensemble Elyma sous la direction de Gabriel Garrido.
Le livret qui accompagne le disque comprend une présentation de ce genre musical, ainsi que les paroles et traductions françaises de ces chansons.

Un plaisir à ne pas bouder.

Il est possible d’en écouter des extraits sur cette page-là, par exemple.

jeudi 3 mai 2007

Les lumières du Marquis


Fabien Vehlmann (scénario), Matthieu Bonhomme (dessin) et Delf (couleur) mettent en scène, dans la série du Marquis d’Anaon, Jean-Baptiste Poulain, un homme des Lumières, à la fois sceptique et ouvert aux phénomènes étranges.

D’une île de Bretagne où sévit un baron fou au cœur de l’Auvergne aux relents de sorcellerie, de l’océan sur lequel erre un navire maudit aux meurtrières montagnes des Alpes , le marquis affronte les mystères et découvre les vérités cachées, la noirceur de l’âme humaine derrière le rideau du surnaturel.


J'aime beaucoup le dessin, à la fois simple et évocateur. Les scènes d'intérieur sont très prenantes, alliant le noir des ombres et l'orangé de la lumière d'une cheminée, par exemple. Le graphisme n'est pas sans rappeler celui de la série Isaac le Pirate.

Quant aux histoires, elles sont un peu inégales, le dénouement arrivant parfois un peu trop vite à mon goût. Mais leur traitement, empreint d’une certaine lenteur et de dialogues économes, a quelque chose de captivant.


Indéniablement, c’est une série à découvrir.


Retrouvez cette série sur le site de la Bédéthèque.

mercredi 2 mai 2007

L'appel de l'Aventure

L’ancre de miséricorde, à bord d’un navire de l’âge d’or de la marine à voile, c’est l’ancre de réserve, celle que l’on utilise dans les situations les plus difficiles quand les autres ancres n’ont pas suffi ou pas tenu.

Ici, c’est le nom d’une boutique de la rue de Siam, dans cette Brest de 1777, ce port de guerre et de commerce, avec les odeurs de goudron de ses chantiers naval, les remugles de la vase de son estuaire, la puanteur de la chiourme. Petit-Morgat, le fils du boutiquier, va se laisser emporter par l’appel de l’aventure, un appel qui prend des formes variées : un bagnard évadé, la figure de proue d’un navire, etc.



C’est relativement récemment que j’ai découvert et acheté ce roman de Pierre Mac Orlan, L’ancre de miséricorde, à l’occasion d’une réédition chez Phébus, collection Libretto (2005), attiré non seulement par le nom de l’auteur mais aussi par la couverture, un extrait d’un tableau de Vernet.


Plus qu’un roman pour la jeunesse, j’y ai découvert le roman d’une initiation, et d’une interrogation sur ce qu’est l’Aventure, ce chant de sirènes qui peut vous conduire sur des chemins au goût amer.

* * * * *

mardi 1 mai 2007

Barry Lyndon : à ne pas rater


Attention, chef d'oeuvre !

Stanley Kubrick au sommet de son art.


La trajectoire météoritique d'un pauvre gars qui devient un lord avant de redevenir ce qu'il n'a jamais cessé d'être.


Des scènes intimistes aux extérieurs aux lumières changeantes, un film qui sait retrouver les touches des pinceaux de Gainsborough ou de Hogarth.


Et la lancinante sarabande de Haendel.


Pour aller plus loin

Si vous avez le "courage", plongez-vous dans le livre qui a inspiré le film, The Memoirs Of Barry Lyndon, Esq. (Thackeray, 1844).