dimanche 14 juillet 2013

Voir Yorktown et mourir... d’ennui

C’est avec une pointe de mauvaise conscience (mais juste un pointe) que je reprends enfin la plume dans ce salon avec un billet « coup de gueule ». Peut-être ai-je, finalement, un mauvais fond ! Je me rattraperai donc avec les quelques billets « coups de cœur » à venir.

Ce coup de gueule est plutôt, tout compte fait, un bâillement. J’évite, désormais, de dépenser plus d’énergie qu’il n’en faut à ce qui me déçoit ou m’horripile. Comme ce roman d’Arnaud Delalande, Notre espion en Amérique (éditions Grasset, 2013, ISBN / EAN : 9782246764816).





Si le temps vous manque pour lire le reste de mon billet, en voici la teneur en quelques mots : sans être totalement exécrable, ce roman n’a pas su me transporter d’enthousiasme, même pas d’un enthousiasme modéré. Je l’oublierai probablement très vite.

Si vous avez un peu plus de temps devant vous, laissez-moi vous en parler un peu plus en détail.

Il y a six ans, j’avais un peu étrillé Le piège de Dante, du même auteur. Je me demandais si, l’eau ayant flué et reflué dans la lagune de Venise, ce nouveau tome des aventures du fils improbable de Casanova et de la Tulipe Noire aurait moins goût de vase que le premier que j’avais lu. Je me suis donc lancé dans sa lecture.
Résultat, je pense avoir lu ce livre en lisant attentivement chaque page du premier tiers, puis en lisant en diagonale chaque page du deuxième tiers, puis en tournant les pages sans même vraiment m’arrêter dessus pendant le troisième tiers. L’impression que j’en retire, c’est que l’auteur a artificiellement plaqué des héros de roman dans une épopée historique qui se suffisait à elle-même. Il suffit d’avoir lu la trilogie de Gilles Perrault, Le secret du Roi, et plus particulièrement le 3e tome, La revanche américaine, pour se rendre compte à quel point il y a là une matière riche et des personnages assez hauts en couleurs sans qu’il soit besoin d’ajouter des personnages fictionnels caricaturaux.
Le mouron rouge, de la baronne Orczy, ce n’est pas un style auquel j’accroche. Alors, les personnages fictionnels de Delalande, avec son ersatz de Casanova, surnommé l’Orchidée noire, son épouse (l’Orchidée blanche...), son fils (qui n’est pas encore entré dans le club floral...), ses adversaires doublement affublés de noms de code tirés de personnages de pièces de Shakespeare et figures de jeu de cartes (ce qui est à peu près aussi risible que de porter bretelles plus ceinture, pour tenir le pantalon), des prétendus espions d’élite qui se font démasquer et tuer en deux coups de cuiller à pot, ça me fait totalement décrocher.
Sans compter les clins d’œil à des films ou des livres, par l’intermédiaire de répliques ou de citations, qui m’ont fait penser non pas à une complicité avec moi, lecteur, mais à une démonstration de camelot de foire qui place ses produits.

Tant qu’à écrire du roman, autant se servir pleinement d’un Beaumarchais, d’un Lafayette, quitte à trahir un peu leur réalité historique ; ils étaient déjà si peu ordinaires que les rendre un peu moins ordinaires encore n’aurait pas été une hérésie à mes yeux.

En résumé, je n’échangerai pas un baril de Perrault contre deux barils de Delalande. Je relirai Le secret du Roi, et ne lirai plus de romans de Delalande (j’en ai lu deux et les ai trouvés ennuyeux les deux ; mon sens du sacrifice a des limites !).


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