Le nom de René Madec ne vous dit peut-être pas grand-chose, à moins que vous n'ayez commencé à entrevoir le destin extraordinaire de ce personnage au travers d'un billet que je lui ai consacré.
Le nom de Clément Marty ne vous peut-être pas plus, mais si je vous glisse à l'oreille qu'il a choisi « Bartabas » comme nom d'artiste, vous serez sûrement moins perdus.
Et quand Bartabas rencontre Madec et nous fait partager cette rencontre, cela donne Voyage aux Indes galantes, un féérique spectacle dépassant la seule prouesse équestre.
Du fort d'Aubervilliers où Bartabas s'était installé en 1989 et où, sous l'étendard de Zingaro, il a travaillé à la création de divers spectacles comme ses Cabarets équestres, Chimère, Eclipse, ou encore Loungta, aux Grandes écuries du château de Versailles où il a fondé, en 2003, son Académie du spectacle équestre, il y a à la fois changement de décor et continuité de l'amour du spectacle et des chevaux. Des spectacles à la force un peu brute, au sens premier du terme, nés du creuset d'Aubervilliers aux spectacles plus académiques nés du manège de Versailles, c'est la même envie de surprendre, la même envie de mêler le rêve et le beau, la complicité des hommes et des bêtes. Fusion de l'animalité et de la grâce qui sont, l'une et l'autre, tant dans les chevaux que dans leurs cavaliers.
Avec ce Voyage aux Indes galantes, Bartabas s'éloigne de son goût pour le dépouillement qui ressort de ses précédents spectacles et nous offre une féérie gorgée des fastes des Indes, où la magie de la pyrotechnie accompagne les chorégraphies équestres, où les chevaux marchent sur l'eau du bassin de Neptune. Le sang portugais des chevaux bat dans des cœurs orientaux, c'est Versailles à Madras et à Bhaktapur, au milieu des escrimeuses, des cerfs-volants, des éléphants.
Ce ne sont pas les vraies Indes, mais plutôt les Indes telles que les rêvaient les Français des Lumières. Ce n'est pas non plus l'adaptation de l'opéra des Indes galantes de Rameau, mais un clin d'œil de celle-ci à celle-là par le titre, par le caractère onirique des deux œuvres. Les musiques du spectacles, d'ailleurs, sont picorées ici et là, mélodies d'Orient, d'Occident, des Amériques aussi.
Le film essaie de restituer la profondeur du spectacle mais, par essence même, puisqu'il grave les images dans la matière, il perd ce sentiment d'éphémère qui fait que le spectacle vivant semble plus fort.Quand on le voit en direct, il me semble que l'on ressent les émotions plus puissamment, que l'on y porte plus d'attention, comme si, du fait de ce caractère éphémère, il fallait être plus gourmand de l'instant présent.
Mais ne boudons pas notre plaisir. A ceux qui n'ont pas eu la chance de voir ce spectacle en direct, le DVD offre la possibilité de s'en régaler tout de même. Il manquera les odeurs du manège, la rumeur des dix mille personnes du public, mais bien des émotions seront présentes néamoins.
A déguster sans modération.
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Les photos utilisées pour illustrer ce billet sont empruntées au site L'internaute à cette seule fin d'illustration et sans volonté de porter atteinte aux droits des propriétaires de ces images.
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5 commentaires:
Je parlais justement des spectacles de Bartabas avec une collègue...parce que je les ai tous loupés!
*Snif=*...
( merci de remuer le couteau dans la plaie. :-P)
Chère Elisabeth, l'objet de mon billet était de dire que si vous les avez ratés "en direct", vous pouvez toutefois vous en faire une idée grâce aux DVD.
Si vous êtes tentée de vous rapprocher un peu de l'expérience du direct, vous pouvez toujours inviter des amis dans votre salon pour faire la rumeur de la foule, et allumer un feu de Bengale pour la lumière et la fumée.
Bon, pour les odeurs de cheval et d'éléphant, si vous n'avez pas de haras ou de cirque à proximité de chez vous, j'ai moins de solution de bricolage. ;-)
Il me reste un autre couteau à remuer dans la plaie avec le spectacle consacré au chevalier de Saint-George, qui aura droit à son propre billet. :-p
Et je compte aussi parler des autres spectacles de Bartabas, mais ce sera dans des billets sur l'autre blog, dans le sillage de Corto. Je suis en train de lire le roman La fin du chant, et cela m'a rappelé, d'une certaine manière, le spectacle Loungta.
J'espère que vous me pardonnerez d'être ainsi votre tortionnaire à distance. :-)
Je ne sais si je vais m'en remettre...Mes sels, où sont mes sels!
A défaut de trouver les substances qui conviennent au mieux, vous pourrez trouver de beaux flacons à sels anti-pâmoison sur cette page-là. ;-)
Que ferais-je sans vous?
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