J'avais déjà signalé ce roman à deux reprises, une fois dans une liste de romans se déroulant dans la Venise du Settecento, et l'autre dans une critique du roman Le piège de Dante où je faisais référence à Vetro comme un roman ayant osé, avec succès, prendre Giacomo Casanova comme personnage principal.
Je n'ai pas lu Vetro dans sa version originale, mais dans une traduction espagnole. Le titre italien, qui signifie « Verre », installe au premier plan un des éléments du roman, un service de table en cristal de Murano qui doit servir de cadeau à personne de moins que Madame de Pompadour. Tandis que le titre espagnol, La apuesta de Casanova, c'est-à-dire Le pari de Casanova, personnifie l'intrigue.
Une partie du roman tourne en effet autour d'un défi que reçoit Giacomo Casanova de la part d'un autre homme à femmes, don Juan Tenorio. Casanova et don Juan, se défiant l'un l'autre dans le grand jeu de la séduction.
Orazio Bagnasco nous livre là un roman passionnant. Certains d'entre vous ont peut-être connu cet auteur au travers de son thriller gastronomique Le Banquet (Denoël, 2000, ISBN-13 : 978-2207249062). Dans Vetro, on retrouve cette passion de Bagnasco pour la bonne chère, qu'il installe au coeur du roman, au même titre que la passion pour les femmes, faisant ainsi à son livre une dimension sensuelle, tangible.
En ce sens, il rejoint, à sa manière, ce que l'on peut savourer dans Casanova – les menus plaisirs ou dans Casanova, un vénitien gourmand.
En outre, la ville de Venise elle-même est très présente dans le roman, tout comme la lagune et ses îles.
Ce roman est également passionnant par ce portrait en contraste qu'il dresse des deux personnages centraux, Casanova et don Juan. Au fil des pages, on se rend compte que ces deux séducteurs, ces deux hommes à femmes, empruntent deux voies très différentes. Casanova aime les femmes, toutes les femmes (au point de refuser de s'attacher à une seule d'entre elles ?), il les aime avec une sincérité qui n'est pas exempte de naïveté. Don Juan, lui, séduit par calcul, il séduit en conquérant et non en amoureux, comme si une rage intérieure le consumait. Casanova lumineux et don Juan ténébreux, voilà ce que j'ai ressenti de cette confrontation.
Je ne dirais pas grand-chose de l'intrigue du roman, car elle doit se vivre pleinement, se savourer comme un banquet préparé par le maître-queux Orazio Bagnasco. Il a osé s'approprier Giacomo Casanova et don Juan Tenorio, et cela donne au roman une force que n'a pas, par exemple, Le piège de Dante qui ne met en scène qu'un ersatz de Casanova.
Affrontez cet hiver 1754, marchez et voguez aux côtés de Casanova et de don Juan, croisez le révérend Lorenzo da Ponte (oui, celui-là même, le librettiste de Mozart) et le cardinal de Bernis, ambassadeur de France et gourmand de tous les charmes de Venise.
N'hésitez pas, apprenez l'italien ou l'espagnol, et installez-vous à cette table de banquet.
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Pour la petite histoire, je trouve la couverture de la version italienne du roman plutôt racoleuse, et en décalage avec le ton du roman.
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2 commentaires:
Ma foi, celui là je ne risque pas de le lire avant un bout de temps... attendu que je ne parle pas un mot d'italien, et encore moins d'espagnol XD
C'est dommage, il est très alléchant... En particulier, comme vous le dîtes si bien, parce que l'auteur s'est approprié des personnages réels, pour l'un du moins, et surtout des mythes imaginaires et littéraires. Ce doit être au moins aussi jouissif à lire qu'à écrire ^o^
Bref... Un jour, peut-être XD
Il vous reste donc à harceler les éditeurs français pour que l'un d'entre eux publie une traduction française.
Si Le banquet a eu du succès dans sa version française, pourquoi cet autre roman de Bagnasco, tout aussi savoureux, n'en aurait-il pas ?
D'autant que Venise, Casanova et Don Juan, ça doit parler à quasiment tous les lecteurs de l'hexagone. :-)
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