lundi 22 août 2011

La peste soit des gribouilleurs !

 
Prenons un sujet qui se prête bien à une adaptation en bande dessinée pour en tirer une histoire tragique, avec des courageux et des lâches, des altruistes et des égoïstes. Prenons la peste qui a frappé Marseille en 1720.
Prenons quelqu’un qui aime les jeux de mots vaseux pour en faire des titres de livres. Le genre d’artiste qui trouvait les titres des romans publiés à chaîne, comme ceux de la série OSS 117. En l’occurrence, prenons quelqu’un capable de faire un jeu de mots à partir d’un autre titre de livre, et qui est content de trouver « Le diable au port ».
Ajoutons, pour faire bonne mesure, un dessinateur de bande dessinée qui a du mal à dessiner deux fois le même visage pour un même personnage, au point qu’il est difficile de le reconnaître d’une case à l’autre. Prenons un même dessinateur qui, comble du paradoxe, n’arrive pas à faire en sorte que des personnages différents aient des visages différents, au point qu’il est difficile de les distinguer les uns des autres dans une même case. Tant qu’à être exigeants, prenons aussi un dessinateur qui ne sachent mettre ses dessins en couleurs qu’avec des tons vifs et saturés, rien dans la demi-mesure.

Secouons le tout…

Nous obtenons la trilogie Le diable au port, de Benoît Lacou (dessin et couleur) et Claude Ecken (scénario), aux éditions Hors Collection : L’étoffe et le fléau (tome 1, 2002, ISBN 2-258-05686-1), Les brasiers de Marseille (tome 2, 2003, ISBN 2-258-05957-7) et Les forçats de lapocalypse (tome 3, 2004, ISBN 2-258-06299-3).


Le tome 3 se termine sur une case qui laissait espérer une suite, mais la suite n’est jamais venue. Enfin, quand je dis « espérer une suite », c’est peut-être un peu trop généreux. Disons plutôt que ça laissait entendre qu’il pourrait y avoir une suite. Mais de là à l’espérer, franchement, non.
La lecture de cette trilogie n’est pas un calvaire ; n’ayant pas le goût de la mortification, je ne serais pas allé au bout de ma lecture si cela avait été si douloureux. Mais cela me donne le sentiment d’un gâchis, une réalisation qui met à mal un projet qui pouvait être sympathique. Les éléments de base sont, certes, plutôt classiques :
- d’un côté, les « bons » : un jeune chirurgien honnête, un maître d’armes vétéran de guerre, une jeune femme victime d’appétits rapaces ;
- de l’autre, les « méchants » : des marchands peu scrupuleux faisant entrer frauduleusement à Marseille des étoffes venues du Levant et dont ils savent qu’elles sont porteuses d’infections, des médecins ignares ou complaisants, des représentants des autorités municipales ayant trop à perdre à perturber le commerce marseillais ;
- au milieu, un peuple bigarré d’artisans, de boutiquiers, de forçats, de marins, chacun traficotant pour arrondir ses fins de mois ;
- le tout dans un décor propice à retenir l’attention, dont le port et la ville de Marseille.

Mais le récit est confus, à vouloir traiter à la fois l’histoire tragique de cette peste et les anecdotes personnelles, à faire entrer des personnages trop nombreux sur une scène trop exiguë.

Récit confus, mise en images ratée. Une trilogie comme trois coups dans l’eau.

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